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voici les debat du senat de la deuxieme lecture.
ORDRE DU JOUR Le Code criminel La Loi sur les armes à feu Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat L'honorable Daniel Lang propose que le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-19, intitulé Loi sur l'abolition du registre des armes d'épaule.
Je commencerai par citer le poète George Santayana, qui a dit que ceux qui ne tirent pas de leçons de l'histoire sont condamnés à répéter les erreurs du passé. Laissez-moi vous expliquer.
Il y a 93 ans, le Parlement du Canada a adopté une loi sur le contrôle des armes à feu obligeant les propriétaires d'armes à feu à obtenir un permis pour toutes leurs armes, qu'il s'agisse d'armes légères, de carabines ou de fusils de chasse. Un an plus tard, cette disposition a été abrogée. Je me reporte aux débats du 6 mai 1921, alors que le ministre de la Justice, Charles Doherty, avait déclaré :
[...] l'on nous a généralement fait observer que la loi existante avait un effet trop rigoureux, qu'elle prête à des abus et cause aux citoyens d'inutiles ennuis.
(1510)
Honorables sénateurs, nous nous retrouvons aujourd'hui devant une situation d'une remarquable similitude, mais, cette fois, il a fallu 17 ans pour abolir une loi qui s'est avérée tout aussi inutile et agaçante.
L'élimination du registre des armes d'épaule est vraiment un moment historique, et notre débat va bien plus loin que le seul registre. Aujourd'hui, le Parlement lance un message de confiance aux propriétaires d'armes d'épaule respectueux des lois. Ils ont enfin eu gain de cause.
Honorables sénateurs, il est important de souligner que le projet de loi à l'étude est l'aboutissement de la décision que les Canadiens ont rendue le 2 mai dernier. Il suffit de signaler le cas de ma région, la circonscription du Yukon. Lorsque les élections ont été déclenchées, au printemps dernier, toutes les maisons de sondage peignaient en rouge le paysage politique du Yukon. Pendant la campagne, l'élimination du registre des armes d'épaule a été l'un des principaux enjeux. Le soir des élections, le paysage politique du Yukon a tourné au bleu. Comme nous le savons, ce fut la même chose dans beaucoup de circonscriptions partout au Canada.
Le registre des armes d'épaule s'est avéré un gaspillage total de l'argent des contribuables. Lorsque cette mesure a été proposée dans le projet de loi C-68, le ministre de la Justice à l'époque, Allan Rock, a déclaré ceci au sujet des coûts du projet de loi :
Nous pensons que cela coûtera 85 millions de dollars.
L'ancien sénateur Jean-Louis Roux a pris la parole ici même et appuyé ce chiffre de 85 millions de dollars, rejetant les affirmations de ceux qui critiquaient la mesure et prétendaient que la mise en place du système d'enregistrement coûterait entre 500 millions et 1,5 milliard de dollars.
Honorables sénateurs, le temps a montré que c'était pire encore. Dès 2004, CBC/Radio-Canada nous apprenait que le registre avait déjà coûté 2 milliards de dollars aux contribuables canadiens.
Au cours de l'étude du registre des armes d'épaule, les témoignages entendus à l'autre endroit en ont montré clairement l'inefficacité. Rien ne prouve que l'élimination du registre puisse changer quoi que ce soit au drame des suicides et des homicides.
Il importe également de signaler aux sénateurs que, d'après ce qu'on dit, les données du registre sont inexactes, les taux d'erreur se situant entre 43 et 90 p. 100. De plus, au cours des 17 années d'existence du registre, personne n'a jamais réussi à prouver que ce registre avait prévenu un seul crime ni sauvé une seule vie.
Comme sénateur du Yukon, j'ai un intérêt particulier pour l'abolition du registre des armes d'épaule. Ceux d'entre nous qui habitent dans des régions éloignées et dans le Nord ont senti que le registre des armes d'épaule était discriminatoire pour tous les habitants du Nord, autochtones ou non. Pour nous, l'arme d'épaule est un outil de travail nécessaire tous les jours, un peu comme le tracteur l'est pour l'agriculteur qui doit labourer son champ. Les Autochtones, plus particulièrement, ont senti qu'ils étaient traités injustement par le registre et que, une fois de plus, le gouvernement s'ingérait dans leur vie.
Imposer par le droit pénal l'exigence de se soumettre à un processus inutilement bureaucratique, voilà qui manifeste une méconnaissance de cette réalité quotidienne. Comme des aînés autochtones me l'ont dit, il s'agit d'une solution ratée qui a été imposée à nos gens par les grandes villes. Honorables sénateurs, j'espère que vous conviendrez avec moi que c'est absolument inacceptable.
J'en reviens encore à l'architecte du registre des armes d'épaule, l'ancien ministre de la Justice Allan Rock. Certains ont dit que, lorsqu'il est arrivé à Ottawa, il pensait que les seuls qui devaient avoir des armes à feu étaient les policiers et les militaires. C'est exactement cette attitude mal inspirée qui a mené à l'échec du registre des armes d'épaule. Elle témoigne d'une incompréhension fondamentale non seulement de la culture des propriétaires d'arme à feu, mais aussi du crime et des moyens de le prévenir.
Le but visé par le registre, c'était de réduire la criminalité. Il a échoué pour la simple raison que seuls les Canadiens respectueux des lois allaient accepter de se plier à cette exigence. Les criminels n'enregistrent pas leurs armes.
En réalité, honorables sénateurs, on ne fait pas reculer la criminalité en harcelant les citoyens respectueux des lois. On le fait en imposant des peines dures, mais justes. On le fait en mettant en place un système correctionnel qui est conçu pour corriger le comportement criminel. On le fait en augmentant le nombre des policiers dans les rues. On le fait par des investissements intelligents qui visent à prévenir les crimes avant qu'ils ne se produisent.
Honorables sénateurs, on fait reculer la criminalité en dépensant efficacement l'argent des contribuables, pas en le consacrant à un système qui ne marche pas.
Ces derniers mois, bien des gens m'ont demandé ce que le projet de loi C-19 allait faire. Permettez-moi d'en expliquer les principes.
Le projet de loi fera disparaître l'obligation d'enregistrer les armes à feu à usage non restreint. Comme je l'ai déjà dit, ces armes sont un outil quotidien pour les ruraux respectueux des lois, les Autochtones, les agriculteurs et les chasseurs pour leurs activités traditionnelles et culturelles, pour répondre aux nécessités de la vie de nos jours. Voilà pourquoi le registre a tellement prêté à controverse dès le début.
Le projet de loi prévoit également la destruction des fichiers existants qui se trouvent dans le Registre canadien des armes à feu. Honorables sénateurs, le registre et ses dossiers sont indissociables. Ils forment une seule et même chose. Détruire le registre en conservant les fichiers, c'est conserver des données qu'il n'y a aucune raison de conserver. D'aucuns ont formulé des critiques, je le sais, soutenant qu'il fallait conserver les fichiers, mais il faut signaler que ces mêmes gens affirment également qu'ils rétabliront le registre des armes d'épaule à la première occasion.
Honorables sénateurs, un engagement a été pris envers les électeurs : le registre des armes d'épaule allait être aboli. Les renseignements personnels qui y sont contenus seront éliminés. Je tiens à vous assurer que, à nos yeux, il est inacceptable de créer un registre par des voies détournées.
Voilà qui m'amène à une autre critique formulée contre le projet de loi à laquelle je veux répondre. Certains ont dit que les provinces devraient avoir accès à l'information contenue dans le registre pour qu'elles puissent lancer une version provinciale de cette politique gouvernementale qui a été un échec. Je ne suis pas de cet avis. Cette information a été fournie par des Canadiens respectueux des lois à leur gouvernement national pour les fins expresses d'un programme national.
Une fois le projet de loi adopté, le registre des armes d'épaule cessera d'exister et, je le répète, le gouvernement fédéral n'aura aucune raison de conserver les renseignements personnels et privés des citoyens. Il serait inacceptable, à mon avis, de communiquer les renseignements personnels des Canadiens à d'autres fins.
Honorables sénateurs, il faut se poser des questions fondamentales au sujet du projet de loi à l'étude. La première est la suivante : ce système a-t-il été efficace? La réponse est un non retentissant. Les données statistiques ne font ressortir aucune corrélation entre la mise en place du registre des armes d'épaule et une diminution de l'utilisation criminelle des armes à feu.
Il faut se poser une autre question : cette dépense en a-t-elle valu la peine? Deux milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent. Combien de policiers aurions-nous pu payer? Combien de programmes de prévention du crime aurions-nous pu offrir? Nous ne le saurons jamais, puisque cet argent a été gaspillé.
Lorsque nous tâchons de prévenir le crime, et surtout les crimes commis avec des armes à feu, nous devons adopter une approche très nette. Il faut veiller à ce que seules des personnes compétentes et autorisées aient des armes à feu. Il faut continuer à lutter énergiquement contre l'importation illégale d'armes à feu. Il faut faire en sorte qu'il y ait assez de policiers dans les rues pour protéger les Canadiens. Il faut investir dans la prévention du crime et la prévention des gangs. Il faut infliger de lourdes peines pour dissuader les gens de commettre des crimes avec des armes à feu.
Honorables sénateurs, j'ai eu l'occasion de parcourir les débats qui ont eu lieu au Sénat lorsque le malheureux projet de loi C-68 a été déposé, en 1995. Il faut signaler qu'il y avait de graves inquiétudes au sujet des ramifications du registre et de ses conséquences. Le temps a confirmé que ces inquiétudes étaient fondées. En fait, certains sénateurs représentant la partie gouvernementale, y compris le sénateur du Yukon, ont voté contre le projet de loi.
(1520)
J'espère, chers collègues, que, lorsque nous aborderons le chapitre final du projet de loi C-19, les sénateurs des deux côtés se sentiront libres de voter pour mettre fin à ce cauchemar des contribuables et pour libérer les propriétaires d'armes d'épaule qui respectent nos lois des sanctions criminelles que prévoit le texte législatif actuel.
[Français]
L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'aimerais m'assurer qu'un temps de parole de 45 minutes sera alloué à la critique de l'opposition, la sénatrice Hervieux-Payette.
Son Honneur le Président : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?
Des voix : D'accord.
[Traduction]
L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, c'est pour moi un grand jour.
Des voix : Bravo!
Le sénateur St. Germain : Non, ce n'est pas mon anniversaire — je dois maintenant rajuster mes bottes de cow-boy —, mais c'est un grand jour parce que je l'avais prédit lors de l'adoption du projet de loi C-68. C'est vrai. Comme le sénateur l'a dit, je suis peut-être un prophète en odeur de sainteté. Après le grand discours du sénateur Lang, il ne reste vraiment pas grand-chose à dire, mais je voudrais quand même prononcer quelques paroles un peu différentes parce que j'étais là lorsque le projet de loi C-68 a été adopté.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour participer au débat sur le projet de loi C-19, Loi sur l'abolition du registre des armes d'épaule. Plusieurs de sénateurs actuellement présents étaient là lorsque le gouvernement libéral Chrétien a créé le registre des armes d'épaule au moyen du projet de loi C-68. À l'époque, la plupart des Canadiens croyaient que le registre n'était pas vraiment nécessaire, que cette décision était peu judicieuse et qu'elle n'augmenterait pas la sécurité de nos collectivités.
C'était le mardi 2 mai 1995. Le Sénat avait alors décidé de permettre au gouvernement de nous priver d'une autre partie de nos libertés individuelles en imposant des restrictions sur le droit des Canadiens respectueux des lois de jouir de leurs biens personnels. Toutefois, trois sénateurs nommés par le gouvernement libéral avaient écouté leur conscience en prenant la part des gens qu'ils représentaient et en votant contre le projet de loi C-68. Si d'autres sénateurs s'étaient joints aux anciens sénateurs Lawson, Lucier et Sparrow, le résultat du vote sur ce projet de loi abusif aurait peut- être été différent.
Depuis l'adoption du projet de loi C-68, les Canadiens d'un océan à l'autre se sont battus contre cette loi. J'ai parcouru le pays de long en large, parlant aux gens pour m'assurer que mon opposition reflétait leur point de vue. Je me souviens d'avoir voyagé dans les Territoires du Nord-Ouest, au moment où Stephen Kakfwi était ministre de la Justice. Je me suis rendu jusqu'au delta du Mackenzie, puis j'ai regagné Fort Simpson. J'ai parcouru toutes ces régions dont les habitants étaient unanimes : cette mesure législative empiétait sur la vie non seulement des Autochtones, mais des gens en général. J'avais passé une nuit à Shingle Point, où des Inuits étaient partis à la chasse à la baleine boréale. Ils ont attendu que la baleine entre dans l'anse. Nous sommes restés dehors cette nuit-là. Le matin suivant, pendant que nous nous réveillions, un groupe d'enfants jouait à l'extérieur quand un énorme grizzli s'est avancé vers l'océan, venant de la montagne. Les Inuits avaient besoin de leurs fusils pour se protéger. Ils ne pouvaient pas se permettre de les entreposer. Leurs armes devaient être prêtes à servir et, Dieu merci, elles l'étaient. Ils n'ont pas tué l'ours. Ils ont fait ce que nos Autochtones font. Ils ont préservé la vie de l'animal, mais l'on fait fuir en tirant quelques coups de feu.
Je n'étais pas le seul voyageur. Des députés faisaient également partie du groupe. J'ai écouté les préoccupations de milliers de propriétaires d'armes à feu respectueux des lois qui considéraient, à juste titre, que le projet de loi C-68 constituait une attaque flagrante du gouvernement contre leur droit constitutionnel de jouir de leurs biens personnels.
Honorables sénateurs, le projet de loi dont nous sommes saisis mettra fin à l'un des programmes les plus coûteux que notre bureaucratie ait jamais administrés. Lorsque le projet de loi mettant en œuvre le registre des armes d'épaule a été soumis au Parlement, le gouvernement avait estimé qu'il lui faudrait 2 millions de dollars pour l'établir et le gérer. Après quelques faux départs, il a fallu à la bureaucratie plus de trois ans et des millions de plus pour mettre sur pied et administrer le registre. En 2003, le gouvernement a demandé au Parlement d'approuver des crédits d'environ 170 millions de dollars pour financer les frais de fonctionnement de cette seule année. Nous étions très loin des 2 millions de dollars prévus à l'origine.
En 2002, la vérificatrice générale Sheila Fraser a publié un rapport cinglant sur les rapports financiers douteux établis sur le registre des armes d'épaule, en précisant que le programme était en bonne voie de coûter plus d'un milliard de dollars aux contribuables. Une fois de plus, la vérificatrice générale avait raison.
Ce registre particulier a également eu des effets injustifiés qui ont directement atteint les propriétaires d'armes à feu respectueux des lois du Canada. Les chasseurs de canards ou d'autres animaux, les agriculteurs et les Autochtones — qui, comme je viens de le dire, dépendent de leurs armes à feu pour maintenir leur mode de vie et leurs traditions culturelles — ont été forcés à participer à un processus bureaucratique. L'objectif — mettre les armes à feu hors de portée des méchants — n'a jamais été établi dans les faits, sous quelque forme que ce soit.
Dans une note remontant à 1995, dont je détiens encore une copie, le ministre d'alors, Allan Rock, disait qu'aucune arme d'épaule ne serait interdite en vertu des dispositions du projet de loi C-68. Honorables sénateurs, c'était bien loin de la vérité, comme je vais le montrer en mentionnant brièvement une décision récente de la GRC, qui est chargée de l'administration du programme.
Fin décembre, les propriétaires enregistrés d'une certaine carabine de calibre .22 — c'est le plus petit calibre qui existe — ont reçu des lettres du Programme canadien des armes à feu administré par la GRC, exigeant qu'ils lui remettent leur carabine sans compensation parce que la GRC, de sa propre initiative, avait décidé de la faire passer de la catégorie des armes à feu sans restrictions à la catégorie des armes prohibées. La raison donnée par la GRC était que la carabine ressemblait à un fusil militaire, même si elle n'en avait aucune des caractéristiques.
Il y a des questions raisonnables à poser ici. La carabine de calibre .22 est l'arme d'épaule du plus petit calibre qui existe. La reclassification était-elle nécessaire? La sécurité du public était-elle en jeu? Le véritable objet du projet de loi C-68 — qui a conféré à la GRC le pouvoir de confisquer les carabines en question dans ce cas — était-il de faire disparaître les armes à feu dans la société canadienne? Pas d'après la promesse faite aux propriétaires d'armes d'épaule par l'ancien ministre Allan Rock.
Honorables sénateurs, le Canada a des lois imposant des restrictions sur la possession et l'utilisation des armes à feu depuis 1877. Il a un registre central des armes à feu à autorisation restreinte depuis 1951 et un système de classification des armes prohibées et à autorisation restreinte ainsi que des armes d'épaule sans restrictions depuis 1968.
De plus, un système de vérification de l'admissibilité des personnes souhaitant acquérir une arme à feu, y compris des carabines et des fusils de chasse sans restrictions, a été établi en 1977. Le système de vérification de l'admissibilité a continué d'être resserré jusqu'en 1991. Ce que je viens de décrire est connu sous le nom de Système canadien d'information sur les armes à feu.
Honorables sénateurs, le principal objet du projet de loi C-68, Loi sur les armes à feu, était de renforcer la sécurité du public. Dans la décision relative au renvoi à la Cour suprême du Canada, la cour a noté que le registre des armes d'épaule représentait une tentative de mettre fin aux problèmes découlant de l'utilisation criminelle ou dangereuse des armes à feu dans des cas tels que le suicide, les tirs accidentels et la violence familiale. La cour a dit que le registre visait à dissuader les gens de faire un usage abusif des armes à feu et à en contrôler l'accès en fonction de la personne qui a présenté la demande et du type de l'arme en cause.
Honorables sénateurs, je dois vous dire, avec tout le respect que je vous dois, que la création d'un sous-registre des armes d'épaule sans restrictions à partir du Système d'information sur les armes à feu n'a absolument rien fait pour renforcer la sécurité du public.
(1530)
Honorables sénateurs, le projet de loi C-19 supprime uniquement l'obligation d'enregistrer les armes à feu autres que les armes à feu prohibées ou à autorisation restreinte, c'est-à-dire les fusils de chasse. Toutes les autres exigences réglementaires qui visent à faire de notre pays un endroit sûr continuent de s'appliquer, comme ce doit être le cas. Nous devons être responsables de la façon dont nous entreposons des armes, et un permis doit être obligatoire pour se procurer des armes à feu.
Honorables sénateurs, au cours des 14 dernières années, le registre a coûté plus de 2 milliards de dollars aux contribuables. Durant cette période, il n'a jamais fonctionné efficacement. Il n'a pas favorisé l'utilisation plus sécuritaire des armes à feu et il n'a pas non plus rendu nos collectivités plus sûres.
Honorables sénateurs, je veux être clair au sujet de l'objet du projet de loi. Cette mesure fait deux choses. Elle ne diminue en rien les obligations relatives à la propriété et à l'utilisation sécuritaire des armes à feu. Par contre, elle élimine le registre des armes d'épaule, et les données liées à ce registre seront détruites. C'est aussi simple que cela.
Au cours des 14 dernières années, la majorité des Canadiens étaient d'avis que le registre des armes d'épaule entraînait une utilisation inappropriée de nos ressources financières et policières. Ce programme malavisé est enfin sur le point de disparaître.
Honorables sénateurs, vous pouvez dire fièrement aux gens que vous représentez que nous avons défait une chose qui n'aurait jamais dû se faire. Pendant la dernière campagne électorale, le gouvernement a promis de se débarrasser de ce registre. C'est l'objectif du projet de loi C-19. Nous devons faire ce qui s'impose, c'est-à-dire adopter cette mesure législative.
J'invite tous les sénateurs à se ranger derrière le sénateur Lang et à appuyer ce projet de loi attendu depuis longtemps. Le gouvernement du Canada tient ses promesses.
Merci. Que Dieu vous bénisse tous.
L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?
Le sénateur St. Germain : Oui.
Le sénateur LeBreton : Il est important que le sénateur St. Germain ait présenté ses observations. Dans la tradition du Sénat, de la Chambre haute, le sénateur a, si ma mémoire est fidèle, donné à notre assemblée l'occasion d'agir comme une Chambre de second examen objectif. Sauf erreur, il a proposé un amendement visant à reporter de six mois l'étude du projet de loi, de façon à laisser les esprits se calmer et à faire en sorte que les gens prennent une décision rationnelle dans un contexte de second examen objectif.
Évidemment, le sénateur jouissait de l'appui de ses collègues mais, malheureusement, ceux-ci n'étaient pas assez nombreux. Je veux savoir si le sénateur se souvient de cet épisode et s'il souhaite en parler.
Le sénateur St. Germain : Je m'en souviens. Nous voulions reporter l'étude du projet de loi parce que les esprits étaient échauffés après un incident qui s'était produit au pays, ce qui était regrettable.
Ce qui était le plus déplorable dans toute cette histoire, c'est qu'une personne comme mon père, qui vivait de la terre et avait besoin de fusils pour chasser et nourrir sa famille, se faisait comparer à des fanatiques qui se servaient de leurs fusils pour tirer sur des gens, que ce soit en Californie ou en Alberta ou à n'importe quel endroit. Cette comparaison était complètement injuste. C'est de cette manière qu'on présentait les choses. C'est ce qui me brisait le cœur parce que je savais à quel point nous respections les fusils durant mon enfance. Ils faisaient partie de nos vies. Leur rôle était équivalent à celui d'un marteau pour un charpentier ou d'un stéthoscope pour un médecin. Pourtant, on nous comparait aux criminels qui utilisaient ces armes de manière irresponsable. Les personnes qui se servaient de fusils ou qui en possédaient une grande quantité étaient considérées comme des fous qui étaient sur le point de détruire l'humanité. C'était regrettable, et c'est pour cette raison que je voulais que le projet de loi soit reporté.
Je comprends le problème. J'ai été policier. Je me suis trouvé dans cette situation. Il y a des criminels qui ont tiré sur moi. Je peux vous le dire, ce n'est pas agréable. Cependant, les gens se laissent emporter par l'émotion. C'est pourquoi je voulais reporter le projet de loi afin de permettre aux gens de retrouver leurs esprits. Il y a des milliers de personnes en Amérique du Nord qui utilisent les armes de manière responsable et à des fins de divertissement.
J'étais au Langley Rod & Gun Club l'autre soir, où des jeunes recevaient des prix pour le tir. C'était des compétiteurs olympiques de Langley, en Colombie-Britannique. J'ai assisté à la cérémonie en compagnie de Mark Warawa, député à l'autre endroit, ainsi que de plusieurs maires des localités voisines. Nous présentions des prix à ces jeunes, qui étaient complètement passionnés par le tir sportif. C'est dans cet esprit que j'ai tenté de faire reporter le projet de loi, afin de permettre aux gens de se calmer et de bien réfléchir à la question. Cela ne s'est pas produit, et nous y voilà.
Nous devrions aujourd'hui utiliser toute notre sagesse et procéder aujourd'hui à un second examen objectif de cette initiative parce que je pense qu'elle est très importante pour beaucoup de personnes.
Son Honneur le Président : Le temps de parole du sénateur St. Germain est écoulé. Le sénateur Dyck aimerait poser une question, mais le sénateur St. Germain devrait demander plus de temps.
Le sénateur St. Germain : Si le sénateur veut poser une question, je vais le faire.
Son Honneur le Président : Cinq minutes de plus.
L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, si je pose la question, c'est parce qu'il s'agit d'un projet de loi controversé. Le sénateur St. Germain a prononcé une excellente allocution. C'est toujours une question très difficile pour nous, les femmes. Le sénateur le sait bien, lui qui a été policier.
Qu'est-ce que le sénateur dit aux organismes comme le YWCA, qui s'est positionné contre l'abolition du registre des armes à feu à cause de la violence conjugale, étant donné que les armes d'épaule sont les plus couramment utilisées pour tuer les femmes? Cela est un problème qui me brise le cœur. Selon le YWCA, le nombre d'homicides conjugaux, surtout envers les conjointes, a chuté depuis la création du registre.
Si le projet de loi était adopté, que répondrait le sénateur à une femme qui lui dirait que sa sœur a été assassinée avec une arme d'épaule? Comment peut-on se faire à cette idée? Quel argument peut justifier l'abolition du registre des armes à feu lorsqu'on sait que de tels incidents se produisent en situation de violence conjugale? Peut-il me convaincre qu'il existe un moyen d'atténuer ce risque?
Le sénateur St. Germain : Selon moi, aucune statistique ne montre que le registre des armes d'épaule a réduit le nombre de crimes violents commis à l'encontre de femmes ou d'hommes — ou la violence, quel que soit le sexe de la victime.
J'ai grandi dans une maison où il y avait des fusils, et les femmes faisaient partie de cette culture. La vérité, c'est que beaucoup de femmes perdent la vie à cause de la violence. Je pense à Willie Pickton. Il ne s'est jamais servi d'une arme à feu. Quand on se penche sur les cas des tueurs en série, on constate que la plupart d'entre eux n'ont pas utilisé d'arme à feu.
Que faudrait-il restreindre ensuite? Je crois qu'il faut se sensibiliser à la violence contre les femmes sous toutes ses formes. Si on le fait et qu'on unit nos efforts, en tant que parents et grands- parents, qu'on fait tout en notre pouvoir pour faire en sorte de supprimer la violence sous toutes ses formes dans nos familles, alors on commencera à voir les choses changer pour le mieux. Tant qu'à s'en prendre aux armes à feu, on peut aussi s'attaquer aux couteaux et à toute une litanie d'autres choses. Une multitude de meurtres sont commis à l'arme blanche. En tant que policier, je peux dire ceci au sénateur. Je me suis rendu sur la scène de meurtres, et je vous assure que c'est à vous déchirer le cœur. Toutefois, on ne peut pas réagir de manière excessive et pénaliser des millions de personnes pour les actes répréhensibles d'un seul individu. La solution consiste à éduquer la population et à éviter que nos jeunes, ou quiconque, soient témoins d'actes de violence contre les femmes dans leurs foyers, quels qu'ils soient.
(1540)
Je me rappelle à quel point mon grand-père St. Germain, qui était métis, était bon avec son épouse. Cette bonté s'est transmise de génération en génération. Mon père a été marié pendant une cinquantaine d'années. Je suis moi aussi marié depuis 50 ans. Mon grand-père ne l'a malheureusement pas été pendant 50 ans parce qu'il n'a pas vécu assez longtemps. Cela faisait partie de notre culture et pourtant, il y avait des armes partout. On enseignait aux familles l'amour, la compréhension, la bonté, mais pas la violence.
L'honorable Caroline Stewart Olsen : Honorables sénateurs, je vais partager mon temps de parole avec le sénateur Brown.
Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-19. Je suis solidaire des agriculteurs, des chasseurs, des Canadiens des régions rurales respectueux de la loi de partout au pays. Ce projet de loi me tient particulièrement à cœur, mais plus encore, c'était et c'est un cri de ralliement pour des gens comme moi qui ont dit : « C'est assez. » De nombreux Canadiens ont perçu le registre des armes à feu comme une attaque directe du Parti libéral envers les habitants des régions rurales. L'Ouest et le Nord ont été durement touchés par cette mesure législative. Après le désastreux Programme énergétique national, c'est à cause du registre des armes à feu que bien des Canadiens se sont mis à tourner le dos au Parti libéral, qui s'est immiscé directement dans leurs foyers et leurs modes de vie. Les libéraux n'ont malheureusement pas eu l'air de s'apercevoir à quel point les citoyens étaient choqués.
Je crois qu'après le PEN, le registre des armes à feu a été le début du déclin du Parti libéral. La lutte a duré 17 ans et arrive enfin à son terme. Au fil des ans et à mesure que les objections continuaient, de plus en plus de gens se demandaient pourquoi on ne les écoutait pas. Les libéraux n'avaient plus de connection avec les électeurs et ne semblaient se préoccuper que des grands centres que sont Toronto et Montréal.
Il faut se rappeler que les Canadiens savaient que des lois très rigoureuses sur le contrôle des armes à feu existaient déjà et, dans le cadre des réformes du gouvernement actuel, les Canadiens seront toujours tenus de se procurer un permis pour acheter ou posséder une arme à feu et d'enregistrer les armes à feu prohibées et à autorisation restreinte, comme les armes de poing et les fusils d'assaut. Pour obtenir un permis d'arme à feu, les gens doivent se soumettre à une vérification de leurs antécédents judiciaires et détenir un certificat de sécurité dans le maniement des armes à feu émis par un instructeur expérimenté. Le registre des armes d'épaule cible inutilement et injustement les Canadiens respectueux de la loi, sans toutefois réduire la criminalité ni maintenir les armes à feu hors de portée des criminels.
Je me souviens de mon père, qui hochait la tête en tentant d'expliquer les tenants et aboutissants de ce projet de loi dans notre région, lui qui était un partisan du Parti libéral et un chasseur de longue date. Ses explications n'ont rien donné. Les gens ont eu une réaction viscérale à l'égard du registre. C'était le gouvernement contre le peuple. Les agriculteurs et les chasseurs, qui respectaient déjà la loi et qui entreposaient déjà leurs armes à feu de façon sécuritaire, étaient fâchés. Personne ne défendait leur point de vue, voilà ce qui les mettait surtout en colère. J'ai participé à de nombreux rassemblements politiques ces dernières années; j'ai pu alors constater que les gens se déplaçaient en grand nombre et qu'il y avait de nombreux anciens libéraux parmi eux. Le registre des armes à feu constituait l'enjeu qui tenait le plus à cœur aux agriculteurs, aux femmes, aux pêcheurs et aux gens ordinaires qui se déplaçaient.
Au fil des ans, une vague de ressentiment a gonflé, et le Parti libéral n'a rien vu, n'en a pas saisi le sens ou n'en a tout simplement pas tenu compte. Le registre s'est révélé extrêmement coûteux pour les contribuables canadiens. Les libéraux ont dit aux Canadiens que le registre coûterait 2 millions de dollars. Or, il en a coûté plus de 2 milliards à ce jour, 2 milliards de dollars dépensés pour forcer les Canadiens des régions rurales à perdre leur temps à remplir des formulaires et à se plier à des formalités administratives, et tout ça pour un registre qui ne sert à rien. Les Canadiens se sont alors sentis comme s'ils étaient des criminels en raison de leur style de vie, et leur ressentiment a pris de l'ampleur.
Le projet de loi du gouvernement mettra enfin un terme à ce gaspillage d'argent des contribuables. Nous veillerons à ce que les renseignements personnels et inutiles sur les honnêtes Canadiens qui ont été recueillis soient détruits. Nous protégerons ainsi la vie privée et assurerons la sécurité des Canadiens. Nous avons à cœur la prévention des crimes commis avec des armes à feu. Nous avons donc adopté des peines minimales obligatoires pour l'utilisation d'une arme à feu lors de la perpétration d'un crime ou depuis une voiture. Grâce au durcissement des peines, les criminels restent en prison; ils ne sont donc plus dans nos rues en train de commettre d'autres crimes. Le projet de loi C-10, Loi sur la sécurité des rues et des communautés, prévoit de nombreuses mesures qui permettront vraiment d'assurer la sécurité des Canadiens, et elles sont bien plus efficaces que le registre.
Je vous supplie d'appuyer le projet de loi C-19 ainsi que les autres mesures que le gouvernement veut instaurer pour réduire la criminalité et pour assurer la sécurité des Canadiens. Je demande aux sénateurs de prendre du recul, d'examiner l'évolution du registre des armes à feu et d'en tirer une leçon. C'est à vos risques et périls que vous refuserez d'entendre les doléances des Canadiens.
L'honorable Bert Brown : Je remercie madame le sénateur Stewart Olsen. Je crois qu'elle a très bien résumé le fond de ma pensée. Je vais pouvoir parler moins longtemps que prévu.
Je me suis entretenu avec quelques chefs de police ces dernières années, dont une femme. Ils m'ont dit préférer qu'on consacre 2 milliards de dollars à l'embauche d'un plus grand nombre de policiers dans leurs municipalités que 2 milliards de dollars et plus à traiter de la paperasse.
Les policiers ont aussi déclaré que, lorsqu'ils sont appelés sur la scène d'un crime potentiellement violent, ils ont appris à supposer qu'il risque d'y avoir des armes à feu, et qu'ils devraient s'y préparer en prévoyant des renforts. Il est très rare qu'on utilise des armes d'épaule pour commettre un vol à main armée. Le problème, c'est le nombre beaucoup plus grand de pistolets qui sont importés illégalement au Canada en provenance des États-Unis. Ce sont généralement ces pistolets qu'on retrouve sur les scènes de crime, et ces scènes de crime sont beaucoup plus fréquentes dans les grandes villes que dans les petites municipalités et les villages. Environ 98 p. 100 des crimes violents sont commis dans les villes, et non dans les petites municipalités et les régions rurales.
Lorsque l'économie ralentit ou traverse une crise, la criminalité augmente et les lâches partent à la recherche d'une arme plutôt que d'un emploi. Ma résidence a été cambriolée trois fois depuis cinq ans que je siège au Sénat. Nous avons fait installer des systèmes d'alarme et des caméras, et la police vient parfois vérifier si tout va bien. La seule façon de contrer les crimes violents, c'est d'avoir davantage de policiers armés. Heureusement, les illuminés sont rares et sévissent peu souvent. Une chose est certaine, on ne les arrêtera pas avec des bouts de papier qui coûtent 2 milliards de dollars et dont le coût augmente d'année en année.
Il y a une dizaine d'années, je suis allé à un bureau de maniement sécuritaire des armes. Quand j'en suis ressorti, j'avais une licence d'instructeur et une casquette indiquant mon nouveau statut. J'ai dit au sénateur Munson que j'allais raconter cette anecdote car elle est amusante. Je ne le vois pas ici aujourd'hui.
Il y a trois ans, j'étais assis dans la dernière rangée, à peu près au milieu de la salle. Un seul pupitre me séparait du sénateur Munson. Il semblait s'ennuyer ce jour-là, et il se tenait la tête avec la main. Il m'a regardé et m'a demandé si j'avais une arme.
Je lui ai répondu : « Oui, mais pas sur moi. » Il m'a dit : « Apporte-la demain et tire-moi dessus si c'est aussi ennuyant qu'aujourd'hui. » Je lui ai répondu qu'il devrait probablement discuter avec sa femme avant qu'il ne sombre davantage dans la morosité. C'est ce qu'il a fait et, le lendemain, il m'a rapporté les propos de sa femme : « Elle pense que ce n'est probablement pas légal. » Et j'ai répondu : « Eh bien, tant mieux, parce que, selon ma femme, ce n'était guère plus légal de vous tirer dessus! »
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Je voulais simplement partager cette histoire amusante avec vous. Je n'en revenais pas qu'il m'ait dit une chose pareille.
Honorables sénateurs, je veux conclure avec quelques remarques au sujet des événements tragiques qui ont eu lieu il y a quelques années, événements qui nous ont marqués à un tel point que le gouvernement fédéral a instauré une loi dans tout le pays. Je ne crois pas que beaucoup de gens savaient que c'était une arme à feu enregistrée qui avait été utilisée dans cette tragédie.
À mon avis, il est impossible de justifier une dépense de 2 milliards de dollars pour une quantité grandissante de paperasse sur des armes à feu. Un de mes amis, après avoir discuté du registre des armes à feu, avait décidé d'enregistrer les siennes. Il les a enregistrées au moyen d'un ordinateur, ce qui est possible, et a ensuite envoyé ses données au Nouveau-Brunswick — du moins, je crois que c'est là qu'elles aboutissent.
Je lui ai demandé comment cela s'était passé et il m'a répondu qu'il les avait toutes inscrites, puis avait appuyé sur le bouton de confirmation et que tout était alors disparu. Je lui ai demandé ce qui était arrivé, mais il m'a avoué ne pas le savoir. Je lui ai alors demandé combien d'armes à feu il avait enregistrées, et sa réponse fut 126. Je lui ai expliqué qu'à mon avis il ne pouvait en enregistrer que 10 ou 12 à la fois par l'entremise du réseau. J'ai alors voulu savoir ce qu'il comptait faire et il m'a répondu qu'il ne ferait plus rien. Honorables sénateurs, il y a de nombreuses armes à feu qui n'ont jamais été enregistrées et qui ne le seront probablement jamais.
J'avais un autre voisin qui possédait près d'une centaine d'armes à feu, je dirais. Il était un amateur et il cherchait à acheter des Winchester, qui revêtent une certaine importance dans l'histoire de l'Ouest du pays. Il courait les ventes aux enchères et achetait de vieux Winchester. Il ne s'en servait pas, il voulait simplement les collectionner. Je crois qu'il en avait près d'une centaine.
Je vais terminer en disant que, lorsque cet homme a tué 16 femmes au Québec, je crois que la véritable tragédie, c'est le fait qu'il ait séparé les hommes et les femmes dans la pièce et qu'il ait tiré sur toutes les femmes. Je sais que c'était un déséquilibré, mais je ne comprends pas pourquoi les hommes qui étaient là n'ont pas essayé de l'arrêter.
L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, ce fut une énorme tragédie et elle continue de faire des remous. Je me souviens d'avoir lu, il y a quelques années, qu'on avait fait bien peu pour empêcher cet homme armé d'en arriver là et que les jeunes hommes présents étaient tellement dépassés par les événements qu'ils ont été incapables d'intervenir pour l'arrêter. J'ai lu aussi qu'au moins un d'entre eux s'était suicidé parce qu'il était tenaillé par le regret de n'avoir rien fait pour empêcher la tuerie. Le sénateur sait peut-être ce qu'il en est exactement. Il est possible que cette tragédie ait pu être évitée, mais elle est d'une telle ampleur qu'elle continuera, selon moi, à nous faire réfléchir pendant des années encore.
Le sénateur a-t-il eu connaissance de ce cas?
Le sénateur Brown : Oui, j'ai entendu exactement la même chose que le sénateur, à savoir que l'un d'entre eux s'est suicidé. J'imagine qu'il lui était insupportable de songer qu'il n'était pas intervenu pour protéger les victimes.
Son Honneur le Président : Y a-t-il d'autres interventions?
L'honorable Yonah Martin : Honorables sénateurs, en tant que citadine, je voulais vous dire que je suis en faveur de ce projet de loi. J'ai eu l'occasion de parler à des propriétaires d'arme à feu et à des familles qui pratiquent la chasse par tradition, de génération en génération. Par exemple, je connais une famille habitant dans la région métropolitaine de Vancouver qui m'a raconté en détail la longue tradition héritée du grand-père d'Italie, qui l'a enseignée à son fils, aujourd'hui père de famille, et à son petit-fils. Cette famille aime cette tradition. Nous voyons parfois, dans ce dossier, un clivage entre la ville et la campagne, mais les habitants des régions urbaines qui pratiquent la chasse, qui respectent les lois et qui ont eu à subir les formalités et la paperasse encombrantes, qu'ils assimilent à un parcours d'obstacles, s'intéressent à cette question et attendent impatiemment l'adoption de ce projet de loi.
Je ne possède pas d'arme à feu et je ne pratique pas la chasse, mais mon mari a grandi dans les Kootenays, à l'intérieur de la Colombie- Britannique, dans une famille où la chasse était une tradition. Je voudrais faire entendre la voix de ceux qui, dans les villes, considèrent eux aussi qu'on leur inflige des tracasseries et des dépenses. Ce point de vue n'est pas seulement celui des Canadiens des régions rurales, bien que les traditions là-bas y soient pour quelque chose, traditions que je respecte, du reste. Les citadins attendent depuis longtemps, eux aussi, le jour où ce projet de loi sera adopté.
Son Honneur le Président : Y a-t-il d'autres interventions?
(Sur la motion du sénateur Hervieux-Payette, le débat est ajourné.)
[Français]
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