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La culture des champs nourriciers

Culture de champs nourriciers pour chevreuils

Bilan sur les semences (1re partie)

Le chasseur de chevreuil est une espèce aussi sollicitée que son propre gibier. Les compagnies productrices de matériels de chasse gravitant autour du chevreuil, ont vite compris que le chasseur, grand rêveur en soi, n'hésitera devant rien pour atteindre son but. Ce rêve a souvent comme idéal la récolte d'un buck pouvant figurer sur la page couverture des magazines de chasse. 

Pour y réussir et avoir une qualité de chasse à faire rêver, la nouvelle tendance semble se déplacer vers l'achat de terre ou la location à long terme pour ainsi l'aménager et créer son propre paradis de chasse aux chevreuils.

Devant cet engouement, aux États-Unis, depuis plus d'une décennie, de nombreux biologistes, spécialisés sur le chevreuil et son habitat, ont constaté cette tendance saisi cette opportunité pour offrir leurs services professionnels. Ainsi, ils suggèrent des aménagements d'habitat pour augmenter le nombre de chevreuils, la grosseur de ces derniers, et produire une plus grande quantité de bucks sur les territoires ainsi aménagés. Sans contredit, l'aménagement le plus populaire issu de cette tendance, est la création de champs nourriciers pouvant attirer un grand nombre de chevreuils dans un secteur donné. Vous conviendrez avec moi que plusieurs compagnies ont vite saisi l'opportunité de mettre sur le marché une quantité surprenante de semences ayant apparemment les attributs pour attirer le buck de vos rêves dans votre champ.

Mais qu'en est-il vraiment de l'efficacité de cette nouvelle mode ? Ces petits champs peuvent-ils apporter la solution à nos espoirs de trophées ? Tous les types de graines actuellement sur le marché sont-ils aussi bons les uns que les autres ? Les coûts reliés à la mise en place de petits champs nourriciers sont-ils abordables pour la moyenne des chasseurs ? Autant de questions et bien d'autres me sont souvent demandées lors de mes séminaires. Devant cet intérêt, nous avons cru bon d'éclairer les lecteurs sur le sujet en réalisant nos propres tests pour ainsi avoir une image plus globale entourant cette nouvelle tendance.

Comme le but premier de cet article n'est pas de tester les différentes semences, quoi que nous en parlerons en détail, l'emphase sera davantage portée sur la méthodologie à suivre pour créer le champ parfait qui, avec les années, deviendra de plus en plus productif.

 

Un potentiel intéressant.

D'abord, avant d'entrer dans le vif du sujet, laissez-moi vous citer quelques statistiques intéressantes au sujet des champs et leurs effets sur les déplacements du chevreuil. Un bon champ d'environ une acre, bien aménagé, peut produire de quatre à six tonnes (une tonne = 850 kilos) de nourriture pour le chevreuil. (Avez-vous pensé que ceci est l'équivalent de près de 10 000 livres de pommes répartis sur six mois sans pratiquement y laisser d'odeur humaine.) À titre de comparaison, un bûcher de même envergure produira environ 80 à 200 kilos de nourriture selon l'âge de ce dernier. Une forêt mature peut produire au maximum 50 kilos de nourriture assimilable par le chevreuil par acre. On estime que les chevreuils vivants en périphérie des zones agricoles peuvent tripler leurs déplacements journaliers pour avoir accès à un champ de qualité. Finalement, les bêtes ayant la possibilité de se nourrir dans des champs agricoles ont tendance à développer des masses corporelles plus grandes et des panaches plus imposants. Quelques sondages ont démontré que, les chasseurs ayant aménagé des champs spécialement pour le chevreuil connaissent plus de succès et récoltent aussi plus de mâles. À la lumière de ces chiffres, vous comprenez mieux pourquoi il peut être attrayant de créer ces petits champs.

Dans un premier temps, vous n'avez pas besoin de posséder une grande terre pour tirer avantage de la création d'un ou plusieurs champs. Partez du principe que trois acres de champ par 100 acres de forêt peuvent doubler l'utilisation de votre terre par la population de cerfs environnante. Les grands champs de plus de deux acres doivent être évités autant que possible. Trop grands, les chevreuils matures des deux sexes hésiteront à s'y aventurer par crainte de s'exposer à découvert.

En raison de leur méfiance légendaire, ils auront tendance à s'y alimenter de nuit. À titre d'exemple, vous avez 50 acres de territoire de chasse, deux petits champs d'une acre suffiront pour créer une différence importante quant à l'utilisation de votre terre par le chevreuil.

Le choix de l'emplacement dépendra du temps et de l'argent dont vous disposez ainsi que de votre liberté de manœuvre si la terre ne vous appartient pas. De vieux chemins forestiers, des champs en friche ou des éclaircies utilisées pour piler le bois lors des dernières coupes sont tout indiqués pour ceux qui ont un budget limité. Pour ceux qui disposent d'un peu de machinerie et de ressources monétaires, la restauration d'un bûcher est souvent recommandée et donne de très bons résultats. Finalement, pour budget sans limites, il peut être avantageux de faire la coupe dans un secteur stratégiquement bien situé à l'endroit où le sol aura en plus les composantes pour produire une nourriture de qualité. À ce stade, il est important de comprendre que le champ peut prendre la forme que vous désirez. En ce sens, il sera favorable de lui donner une forme irrégulière pour en augmenter les bordures qui généralement procurent une grande quantité d'autre nourriture d'appoint pour le chevreuil.


Élaboration d'un champ de semence 

Passons immédiatement à la méthodologie, nous reviendrons plus tard à l'aspect monétaire de l'exercice. La première opération, peu importe le choix du site, consiste à mettre le sol complètement à nu. Pour ce faire, vous pouvez utiliser différents outils. L'été dernier, nous avons fait deux champs directement sur notre terre dans deux types d'habitats différents avec le souci de maintenir les coûts le plus bas possible.

J'ai choisi de restaurer une partie (environ un quart d'acre) d'une petite coupe à blanc et finalement une ancienne zone de débardement (emplacement utilisé par les entrepreneurs forestiers pour accumuler le bois d'une coupe forestière avant son transport) d'environ 1,5 acre. Dans le premier cas, nous avons coupé complètement la repousse d'arbustes et de framboisiers à l'aide d'une débroussailleuse. Ensuite, nous avons nettoyé ce secteur de tous les débris de l'ancienne coupe

comme les grosses branches sèches, les roches ainsi que les souches et racines des arbres coupés trois années plus tôt. Considérant que plusieurs grosses souches n'ont pu être extraites avec un véhicule tout-terrain (4 roues), nous avons cultivé autour de ces dernières pour éviter l'utilisation de grosses machineries. Une fois le sol bien dégagé, nous avons employé une petite herse à dents d'un mètre de largeur pour compléter la préparation du sol. Celle-ci était simplement fixée puis remorquée à l'arrière du VTT. L'ajout d'un poids sur la herse peut aider considérablement à dénuder le sol convenablement. Je dois vous aviser que cette étape nécessite beaucoup de travail physique, car il faut nettoyer régulièrement la herse qui se remplit de racines de toutes les grandeurs. De plus, si le sol de l'endroit choisi renferme beaucoup de roches, ce travail a tendance à exposer ces dernières que vous devriez idéalement enlever pour augmenter la productivité de votre champ. Tous les débris furent brûlés sur place et les cendres étendues sur le futur champ pour réduire l'acidité du sol.

Dans le cas de la zone de débardement , nous avons dû utiliser un vieux tracteur de ferme muni d'une pelle dompeuse pour étendre la terre organique, entassée sur les côtés une dizaine d'années auparavant. Cette étape était primordiale car la pauvreté du sol sablonneux aurait nécessité l'ajout d'une trop grande quantité de fertilisant et ainsi augmenté les coûts monétaires de l'opération en plus d'engendrer des conséquences néfastes sur l'environnement.

Une fois cette étape terminée, vous devez faire un test de sol pour connaître son pH. Toutes les coopératives agricoles du Québec vous expliqueront comment prélever les échantillons de terre et feront ces tests pour vous (environ 25 $). Sans avancer des explications très scientifiques sur l'importance d'un pH équilibré, je vous résume les grandes lignes de cette étape capitale. Pour la culture en général, un sol peut avoir un pH variant entre 4,5 jusqu'à 7,5. Plus son pH est bas, plus le sol est acide. Les semences adéquates pour le chevreuil poussent bien dans des sols au pH variant entre 6,2 et 7,0 selon le type de graines. Notons simplement que la plupart des trèfles (blanc, alsike, ladino ou spécialisés comme ceux de la compagnie WHITETAIL IMPERIAL Clover et ceux de la compagnie BIOLOGIC) poussent bien à des pH variant entre 6,2 et 6,5. Pour augmenter le pH d'un sol acide, vous devez y incorporer de la chaux à raison d'environ 1,5 à 2 tonnes par acre pour faire passer un pH de 5,9 à 6,2. Cependant, il est bon de savoir que cette même quantité de chaux sera insuffisante pour espérer obtenir une hausse égale (0,3) du niveau de pH, lorsqu'un sol est plus acide et que son niveau de pH est plus bas. À titre de comparaison, pour une même acre au pH de 5,6,  vous aurez besoin d'approximativement 2 à 2,25 tonnes pour accroître le pH à 5,9. Il est donc sage de demander conseil auprès de personnes compétentes pour bien évaluer les besoins en chaux de votre sol, en fonction de la superficie traitée. Il est très important d'avoir un bon pH car non seulement ce dernier favorise un meilleur rendement de vos semences mais en plus il augmentera de manière très significative l'assimilation de fertilisant par les plantes. En effet, lorsqu'un pH est sous la barre du 6,0, l'effet des fertilisants peut diminuer de plus de la moitié. La chaux en granule est vendue en sacs de 10 à 40 kilos ou encore en vrac. Pour vous procurer une quantité importante, il est avantageux d'opter pour le vrac, vous réaliserez d'importantes économies. En achetant de la chaux en sacs, vous payerez jusqu'à 250 $ pour une tonne, tandis qu'en vrac, une telle quantité peut vous en coûter aussi peu qu'une trentaine de dollars !

Par conséquent, plus votre sol sera pauvre, plus l'investissement sera considérable…  Cependant rassurez-vous, une fois le taux de pH idéal atteint, celui-ci se maintiendra à un niveau acceptable pour les trois à cinq années suivantes. En effet, les sols s'acidifient relativement lentement. Pour éviter un investissement majeur après ces trois à cinq ans, vous pouvez, si vous le désirez, entretenir votre sol avec un apport minimal de chaux à chaque année.

Avant d'incorporer la chaux à votre sol, il peut être bon d'étendre un herbicide de type Round-Up pour vous assurer de tuer la repousse de mauvaises herbes et ainsi avoir une excellente production pour plusieurs années consécutives. Cette étape nécessite deux semaines de repos des champs après l'application de l'herbicide avant d'entreprendre l'étape finale de la semence. Dans mon cas, j'ai choisi de ne pas utiliser d'herbicide, le côté environnementaliste en moi a pris le dessus sur le reste… J'ai aussi économisé près de 200 $ en évitant cette étape.

Vient ensuite l'étape de la fertilisation. Cette étape peut, elle aussi, faire partie d'une prise de conscience environnementale. En effet, les fertilisants minéraux et chimiques sont très dommageables pour l'environnement. Quoique l'utilisation de fertilisants peut facilement faire doubler la productivité d'un champ, j'ai choisi de ne pas en utiliser dans mes champs considérant que la chasse aux chevreuils est une activité de loisir avant tout. Par contre, je me dois de vous dire que certains sols nécessitent l'utilisation de fertilisants pour procurer une production convenable qui justifiera l'investissement en temps et en argent pour la préparation de votre champ cultivé. Les compagnies distributrices de semences pour les chevreuils ne vont pas réinventer l'agriculture. La production de fourrage de qualité est une science en soi très bien connue qui a fait l'objet de nombreuses études. Les conclusions sont toujours les mêmes. Au départ, plus votre sol est naturellement riche en éléments organiques et minéraux, moins vous devrez y consacrer de temps et d'argent pour y stimuler la production. D'où l'importance capitale de choisir l'emplacement de votre champ autant en fonction de la qualité du sol que de la facilité mécanique de préparer le terrain. Tout comme le pH, ce sera le test de sol qui déterminera le type d'engrais et la quantité à y étendre pour maximiser la production. Pour ceux qui choisissent cette avenue, calculez un montant légèrement supérieur en fertilisant que ce que vous aurez investi en chaux.

Passons à l'étape de la semence de votre champ. Peu importe le type de graines choisi, cette étape sera presque toujours la même. Premièrement, vous avez besoin de faire un lit pour vos graines. Un lit veut simplement dire que vous devez taper votre sol pour que les graines puissent germer et s'enraciner le plus solidement possible.

Vous n'êtes pas obligé d'utiliser un rouleau compresseur pour cette étape. Pour les tests dont il est question dans cet article, nous avons simplement utilisé notre VTT. En conduisant à basse vitesse partout sur le sol dénudé, nos résultats furent suffisamment probants pour vous suggérer la même chose. Il est maintenant temps de semer votre futur champ. Certaines graines sont beaucoup plus petites que d'autres. En général, vous pouvez utiliser un semoir à main obtenu dans une pépinière ou une coop. Vous pouvez aussi vous procurez un semoir mécanique remorquable par VTT. Certaines personnes sèment à la main à la volée, je ne vous le suggère pas car vous devez avoir une bonne expérience pour réussir uniformément votre étendage. À cette étape, soyez le plus systématique que possible pour éviter d'avoir des secteurs sans graines et des secteurs avec trop de graines. Deux erreurs que nous avons faites sur notre terre… Les compagnies ont fait beaucoup de tests et le poids de graines suggéré pour une superficie donnée est généralement calculé pour procurer le meilleur résultat possible. Une trop grande concentration de graines risque d'étouffer la pousse et ralentir le rendement.

Dernière étape avant d'observer le fruit de vos efforts. Vous devez repasser avec votre VTT pour enterrer vos graines. Encore une fois, vous pouvez acheter des outils spéciaux qui s'attachent à votre VTT pour réaliser cette étape. Par contre, vous pouvez aussi être imaginatif pour réduire les frais en équipement. Faites comme nous et laissez traîner une longueur de quatre pieds de clôture quadrillée comme celles entourant la plupart des écoles. Ce fut suffisant pour remettre environ _ de pouce de terre sur les semences.

Comme vous voyez, le procédé est assez simple en soi. Les résultats seront en fonction de l'énergie et de l'argent que vous serez disposé à investir. Pour chaque étape de la méthodologie que vous négligerez, votre futur garde-manger pour chevreuils s'en ressentira directement. En semant vos champs à la fin mai, vous devriez être en mesure de faire une coupe au début du mois d'août pour préserver une hauteur d'environ six pouces. Ainsi, vous garderez les pousses jeunes donc plus protéiques et attrayantes pour le chevreuil. Dans beaucoup de cas, vous n'aurez pas cette option de coupe dû au sur-broutage qu'exerceront les chevreuils. Une coupe peut quand même s'avérer positive pour diminuer la repousse de mauvaises herbes si vous avez choisi l'option plus écologique sans herbicide. Cette coupe aura comme effet de tuer une bonne partie de cette mauvaise herbe.

 

Frais encourus

Maintenant, combien coûte l'établissement d'un bon champ d'une acre de superficie en milieu forestier ? De manière générale, les mêmes frais de base reviennent toujours peu importe l'endroit sélectionné. Ces frais reliés au sol trop acide sont normaux. Il est très rare de trouver un endroit qui ne nécessitera pas l'application d'au moins deux tonnes de chaux par acre. Calculez donc environ 150 $ pour cette étape. Les fertilisants coûtent environ le même prix selon les besoins et finalement les graines coûteront entre 30 et 200 $ à l'acre selon la sorte que vous choisirez. Donc en moyenne, nous parlons d'environ 500 $ de produit par acre cultivée.

Le prix peut vite doubler voire quintupler si vous devez partir de zéro. En effet, si vous choisissez le secteur pour produire un champ en fonction de la qualité du sol et de la disposition stratégique de ce dernier pour la chasse et que malheureusement cet endroit se trouve en pleine forêt, les coûts grimpent rapidement. La coupe de bois peut se faire généralement sans frais en échange de la valeur en bois du secteur récolté. Dans les régions où les forêts de grande valeur se font plus rares, il peut être possible d'inclure dans l'échange, le désouchage et le nettoyage du secteur en question à moindres frais. Pour avoir travaillé de concert avec quelques propriétaires qui ont payé pour le désouchage et le nettoyage de quelques champs d'une acre, les coûts reliés à cette opération s'élèvent à environ 1200 $/acre. En voici la répartition: 8 heures de pelle technique en désouchage à 90 $/heure et 8 heures de nettoyage avec une gratte munie d'une lame à dents qui sert de peigne à 50 $/heure. Pour ces deux étapes, je vous recommande d'être présent pour vous assurer que ces opérations seront faites avec soin afin de conserver la couche de terre arable sur place. Certains sols n'ont pas une couche arable très épaisse et le sable remonte vite en surface lorsque l'opérateur de la machinerie va trop vite ou n'est pas attentif.

À cette facture, vous devrez aussi ajouter la location de l'équipement pour herser le champ si vous ne possédez pas de VTT. Comme vous pouvez le constater, la préparation d'une superficie cultivable peut facilement atteindre 2000 $/acre sans compter l'achat des semences proprement dites.

Peut-on réussir un champ attrayant à moindre coût ? Sur notre terre, nous avons établi un champ d'environ une acre pour la modique somme de 200 $ (incluant les semences, et la préparation du sol). Évidemment, nous étions propriétaires de la machinerie et nous avons choisi une semence (trèfle ladino) qui pousse tout de même bien à un pH bas de 6,0 à 6,2. Je n'ai donc pas eu besoin d'utiliser de chaux et j'ai choisi de ne pas engraisser le champ avec des fertilisants. Six à huit chevreuils s'y alimentaient par jour.

 

Types de semences

Après tant de points techniques sur la préparation, il ne nous reste plus qu'à regarder le type de semences à préconiser. Sur ce sujet, je dois vous aviser de plusieurs petites choses. D'abord, il n'existe aucune culture qui ne nécessite pas de travail. Quelques compagnies ont eu l'audace de mettre sur le marché des mélanges de plantes soi-disant faciles à établir, qui ne requiert aucune préparation du sol…  En théorie, ils sont conçus pour être semés directement à travers la végétation en place, puis entrer graduellement en compétition avec celle-ci pour finalement s'établir progressivement. Nous en avons testé quelques-uns et le résultat fut nul. Ne pensez-vous pas que si ces fameuses plantes existaient, les cultivateurs seraient les premiers à les utiliser pour ainsi réduire leur tâche et se débarrasser d'une partie de leur machinerie pour la préparation du sol ? Deuxièmement, d'autres compagnies ont fait la mise en marché de graines pour fourrage d'été et d'autres pour fourrage d'automne. Excellente idée en soi puisque les deux types de fourrage fournissent aux cerfs une nourriture appropriée pour convenir à leurs besoins alimentaires spécifiques du moment. Cependant au Québec, notre saison de production est trop courte pour établir des champs spécialisés à haute teneur en protéines au cours de l'été (pour favoriser la croissance des cornes) puis poursuivre par la mise en place de champs automnaux composés de plantes moins protéiques mais plus grasses pour favoriser le gain de masse corporelle chez le chevreuil. 

Ceci étant dit, nous avons testé sept sortes de graines dans plusieurs champs et plusieurs régions du Québec. La plupart d'entre elles furent mises en compétition avec d'autres types de graines. Lorsque des graines furent testées par rapport à d'autres semences, la même méthodologie fut utilisée. Les facteurs suivants ont été comparés:

  •  la rapidité et le taux de germination des différentes semences ;
  • la résistance à la sécheresse ;
  • la production à l'ombre ;
  • la résistance au surbroutage induit par le chevreuil ;
  • l'attrait pour le chevreuil en été et en automne ;
  • la résistance aux gelées ;
  • et finalement, à titre d'information, le taux de pH idéal pour sa culture.

Nous avons comparé deux types de mélange de la compagnie BIOLOGIC soit le produit FullDraw  composé d'une plante nommée brassica et qui ressemble à une sorte de laitue, puis le produit nommé New Zealand Fall Premium Attactant (NZFPA), qui est un mélange de chicoré, de trèfle et de plantes de la famille des navets. Un fait à noter pour les mélanges

BIOLOGIC, toutes les graines sont issues de la Nouvelle-Zélande et elles font fureur aux États-Unis. Nous avions également le produit Clover de la compagnie WHITETAIL IMPERIAL, qui est un trèfle blanc ladino à haut taux de germination. Un trèfle blanc ordinaire ainsi que de la luzerne obtenus auprès des Coopératives agrées du Québec faisaient également partie des semences testées. Le mélange Plantes Mixtes de la compagnie québécoise LA FERME MONETTE, constitué de plus de dix sortes de plantes faisait également partie du groupe et finalement le mélange Trophy Garden de l'autre compagnie québécoise BUCK EXPERT, dont le mélange contient pas moins de 14 espèces de plantes, complétait le tableau.

Dans quelques champs d'environ une acre, des carreaux de superficie similaire furent semés avec chaque type de graines. La même préparation fut mise en place pour chaque type de semence. Pour une idée globale des résultats obtenus, nous vous offrons une présentation par tableau pour vous rendre la consultation plus facile.

À ce stade, il serait trop simple de s'en tenir au tableau des résultats sans émettre quelques commentaires suite à de nombreuses heures d'observations directes et indirectes réalisées par des caméras de surveillance. Il faut également savoir qu'un type de graines ne réagit pas de la même façon d'un sol à un autre. Si la terre d'un secteur donné lui fournit la composition parfaite des éléments dont elle a besoin, cette graine démontrera très probablement une excellente croissance (à moins de sécheresse, de gelée ou autre facteur externe). En contrepartie, ce même type de graine peut procurer un rendement beaucoup moins intéressant en un autre endroit, uniquement en raison d'un sol inadéquat.

C'est d'ailleurs ce qui s'est produit lors de nos tests. Le rendement de certains types de semences a différé légèrement d'une placette échantillon à une autre. Notez que les résultats présentés dans le présent article ont été constatés sur trois différents sites de tests. En effet, nous avions deux placettes échantillons en Outaouais puis une autre en Beauce. En Outaouais, les deux sites de tests ont révélé des rendements très similaires: le mélange Full Draw de BIOLOGIC est arrivé bon premier, suivi du Clover de WHITETAIL (trèfle ladino à haut taux de germinaison), puis du trèfle blanc ordinaire. Les essais réalisés en Beauce, quant à eux, classent la luzerne en tête de ligne, suivi, ex æquo du Clover et du trèfle blanc. Le mélange Full Draw, qui s'est pourtant démarqué en Outaouais, termine la course en troisième position. Quant aux produits québécois, je suis forcé d'admettre des résultats plutôt mitigés, et ce, à tous les sites d'expérimentation. Ceux-ci sont peut-être explicables par la toute récente incursion de ces compagnies dans un secteur d'activité dans lequel elles ont très peu d'expérience.

À la lumière de résultats aussi variables, quel type de semence devriez-vous employer dans votre propre secteur, me demanderez-vous ? Je crois, que pour la première année, il serait préférable de semer deux à trois types de mélanges pour deux bonnes raisons. Tout d'abord, cela vous permettra de constater le rendement de chacun par rapport au type de sol de votre champ. En second lieu, vous couvrirez ainsi vos arrières, dans le cas où une semence en particulier connaîtrait une mauvaise saison.

Voyons ensemble plus en détail, les types de semences qui ont donné un rendement intéressant. Dans un premier temps, la luzerne s'est avérée définitivement très attrayante pour le chevreuil. De plus, elle présente l'avantage majeur d'être une plante vivace possédant une durée de vie variant de 10 à 15 ans. Pour lui assurer un bon rendement à long terme, il suffit de fertiliser le sol au besoin puis de vérifier et corriger, si nécessaire, le niveau de pH. Ce dernier point est toutefois l'inconvénient majeur en ce qui concerne ce produit. En effet, la luzerne nécessite un pH élevé (6,5 à 7) pour s'établir convenablement et ne produira pas de résultats concluants dans un sol trop acide. Elle est donc appropriée pour un sol dont le pH sera initialement élevé pour éviter de devoir procéder à un apport massif de chaux, ce qui entraînerait des coûts élevés. Généralement, un champ fraîchement défriché en milieu forestier sera plus ou moins indiqué pour y cultiver ce type de semence. Dans un champ déjà existant, les chances que le pH soit plus élevé sont meilleures. En tout premier lieu, avant d'arrêter votre choix sur ce type de semence, il est impératif de vérifier cette donnée. Si le niveau de pH de votre sol est faible, il serait plus sage de se tourner vers d'autres types de semences qui y pousseront bien. Ou encore, déterminez un autre emplacement au sol plus approprié pour élaborer votre champ de luzerne.

Le mélange FullDraw de BIOLOGIC a également eu une cote de popularité très élevée auprès des chevreuils. Certaines nuits de surveillance, ce carré de champ était le seul à être visité par ces derniers. Sa résistance au broutage aurait pu être favorablement comparable aux autres puisque, malgré cette utilisation abusive, les plantes ont toujours continué à pousser.

Dans le cadre de cet article, j'ai eu la chance de visiter les installations de Charles Alseimers (photographe et chroniqueur américain spécialisé sur le chevreuil) ainsi que les terres aménagées par la compagnie NorthCountry WHITETAIL dans l'état de New York où l'on se spécialise dans l'aménagement spécialisé de terres privées pour la production de chevreuils de qualité. Dans les deux cas, les résultats ressemblaient aux nôtres quant à l'attrait exercé par le mélange FullDraw.

Dans un autre ordre d'idée, il est normal de constater de bonnes résistances à la sécheresse des produits BIOLOGIC car les plantes proviennent de la Nouvelle-Zélande, un pays au climat sec. De plus, les compagnies américaines WHITETAIL IMPERIAL et BIOLOGIC ont plus de dix ans d'expérience dans le domaine des semences pour le chevreuil. Ces deux compagnies ont d'ailleurs des centres de recherche expérimentale où sont testés sur le terrain des mélanges sans cesse améliorés pour subvenir aux besoins alimentaires du chevreuil.

Par contre, au chapitre des inconvénients, la semence FullDraw nécessite d'être ressemée à chaque année puisqu'elle est une annuelle. En ce sens, elle engendre un investissement plus important. Cependant, la plupart des autres mélanges à l'essai doivent aussi être ressemés partiellement pour optimiser la productivité les saisons suivantes. Après trois ans, tous ces mélanges, à l'exception de la luzerne, devront être semés de nouveau pour produire à leur plein potentiel. À la lumière des résultats, je cultiverais personnellement la moitié d'un champ avec le produit BIOLOGIC FullDraw et l'autre moitié, avec le WHITETAIL IMPERIAL Clover. Si je n'avais aucune compétition avec les terres voisines, je choisirais le bon vieux mélange de trèfle blanc ordinaire des COOPS, en raison de son coût moins élevé.  Et si le sol de mon champ démontrait initialement un taux élevé de pH, j'envisagerais également l'emploi de la luzerne, qui s'avère aussi plus abordable que les mélanges spécialisés de différentes compagnies.

Quoique les graines des deux compagnies québécoises ont un certain attrait, elles nécessitent des améliorations notables pour rivaliser avec la compétition américaine. Pour avoir discuté à plusieurs occasions avec des agronomes et des botanistes, les compagnies québécoises font fausse route en tentant de mettre trop de types de plantes dans le même mélange et par conséquent dans le même champ. Plusieurs sortes ne germent pas dû à la compétition entre elles pour s'établir ou à un sol inadéquat.

Maintenant, qu'en est-il des questions suivantes? : Ces champs peuvent-ils concurrencer ceux des agriculteurs en milieu agro-forestier ? Y a-t-il d'autres aménagements à faire aux alentours de ces petits champs forestiers pour augmenter encore plus les chances de succès? Sont-ils la solution miracle pour les chasseurs! La disposition de certains champs peut-elle s'avérer plus stratégique que d'autres? La création de petits champs assure-t-elle des visites de jour par les cerfs environnants ? Peut-on aiguiller le déplacement des chevreuils fréquentant ces champs pour ainsi les forcer à emprunter les mêmes sentiers. Autant de questions et bien d'autres auxquelles je tenterai de répondre dans mon prochain article.

En conclusion, en raison du temps et des coûts relativement élevés impliqués dans la création de bons champs alimentaires, il est impératif de faire un choix éclairé quant à leur emplacement, choix qui sera dicté principalement par la qualité du sol. Si ce dernier ne constitue pas votre principal critère de décision, vous vous exposez à un rendement décevant ou alors vous serez contraints de pallier à la pauvreté du sol en injectant des sommes supplémentaires en divers produits, sans compter le travail additionnel… De plus, la préparation du sol, malgré le travail considérable que représente cette étape, ne devrait en aucun cas être bâclée ou faite à la hâte. Et finalement, il serait beaucoup plus prudent et réfléchi, du moins pour la première année, de semer deux à trois types de semences (chacune dans une section distincte de votre champ), pour éviter les mauvaises surprises et les déceptions ! De cette façon, vous serez à même de constater celles qui offrent un bon rendement en fonction de la composition spécifique du sol de votre champ. N'oubliez pas qu'un taux de pH adéquat est également un facteur déterminant pour assurer une croissance optimale. Ne perdez pas de vue que les résultats finaux seront directement reliés à la rigueur de l'exercice. Par contre, le travail impliqué et l'argent investi n'ont d'égale que la satisfaction de voir votre territoire de chasse accroître son potentiel, pour vous mener vers le succès.

Pour cet article, je dois remercier plusieurs collaborateurs qui ont généreusement donné de leur temps et ont bien voulu partager leurs connaissances. Mario Boivin, mon fidèle second sur notre terre, Bernard Fiset, Eric Tremblay, Charles Alseimers et Doug Douherty.

 

Louis Gagnon

14 mars 2004


Culture de champs nourriciers pour chevreuils

Bilan sur les semences (1re partie)

Le chasseur de chevreuil est une espèce aussi sollicitée que son propre gibier. Les compagnies productrices de matériels de chasse gravitant autour du chevreuil, ont vite compris que le chasseur, grand rêveur en soi, n'hésitera devant rien pour atteindre son but. Ce rêve a souvent comme idéal la récolte d'un buck pouvant figurer sur la page couverture des magazines de chasse. 

Pour y réussir et avoir une qualité de chasse à faire rêver, la nouvelle tendance semble se déplacer vers l'achat de terre ou la location à long terme pour ainsi l'aménager et créer son propre paradis de chasse aux chevreuils.

Devant cet engouement, aux États-Unis, depuis plus d'une décennie, de nombreux biologistes, spécialisés sur le chevreuil et son habitat, ont constaté cette tendance saisi cette opportunité pour offrir leurs services professionnels. Ainsi, ils suggèrent des aménagements d'habitat pour augmenter le nombre de chevreuils, la grosseur de ces derniers, et produire une plus grande quantité de bucks sur les territoires ainsi aménagés. Sans contredit, l'aménagement le plus populaire issu de cette tendance, est la création de champs nourriciers pouvant attirer un grand nombre de chevreuils dans un secteur donné. Vous conviendrez avec moi que plusieurs compagnies ont vite saisi l'opportunité de mettre sur le marché une quantité surprenante de semences ayant apparemment les attributs pour attirer le buck de vos rêves dans votre champ.

Mais qu'en est-il vraiment de l'efficacité de cette nouvelle mode ? Ces petits champs peuvent-ils apporter la solution à nos espoirs de trophées ? Tous les types de graines actuellement sur le marché sont-ils aussi bons les uns que les autres ? Les coûts reliés à la mise en place de petits champs nourriciers sont-ils abordables pour la moyenne des chasseurs ? Autant de questions et bien d'autres me sont souvent demandées lors de mes séminaires. Devant cet intérêt, nous avons cru bon d'éclairer les lecteurs sur le sujet en réalisant nos propres tests pour ainsi avoir une image plus globale entourant cette nouvelle tendance.

Comme le but premier de cet article n'est pas de tester les différentes semences, quoi que nous en parlerons en détail, l'emphase sera davantage portée sur la méthodologie à suivre pour créer le champ parfait qui, avec les années, deviendra de plus en plus productif.

 

Un potentiel intéressant.

D'abord, avant d'entrer dans le vif du sujet, laissez-moi vous citer quelques statistiques intéressantes au sujet des champs et leurs effets sur les déplacements du chevreuil. Un bon champ d'environ une acre, bien aménagé, peut produire de quatre à six tonnes (une tonne = 850 kilos) de nourriture pour le chevreuil. (Avez-vous pensé que ceci est l'équivalent de près de 10 000 livres de pommes répartis sur six mois sans pratiquement y laisser d'odeur humaine.) À titre de comparaison, un bûcher de même envergure produira environ 80 à 200 kilos de nourriture selon l'âge de ce dernier. Une forêt mature peut produire au maximum 50 kilos de nourriture assimilable par le chevreuil par acre. On estime que les chevreuils vivants en périphérie des zones agricoles peuvent tripler leurs déplacements journaliers pour avoir accès à un champ de qualité. Finalement, les bêtes ayant la possibilité de se nourrir dans des champs agricoles ont tendance à développer des masses corporelles plus grandes et des panaches plus imposants. Quelques sondages ont démontré que, les chasseurs ayant aménagé des champs spécialement pour le chevreuil connaissent plus de succès et récoltent aussi plus de mâles. À la lumière de ces chiffres, vous comprenez mieux pourquoi il peut être attrayant de créer ces petits champs.

Dans un premier temps, vous n'avez pas besoin de posséder une grande terre pour tirer avantage de la création d'un ou plusieurs champs. Partez du principe que trois acres de champ par 100 acres de forêt peuvent doubler l'utilisation de votre terre par la population de cerfs environnante. Les grands champs de plus de deux acres doivent être évités autant que possible. Trop grands, les chevreuils matures des deux sexes hésiteront à s'y aventurer par crainte de s'exposer à découvert.

En raison de leur méfiance légendaire, ils auront tendance à s'y alimenter de nuit. À titre d'exemple, vous avez 50 acres de territoire de chasse, deux petits champs d'une acre suffiront pour créer une différence importante quant à l'utilisation de votre terre par le chevreuil.

Le choix de l'emplacement dépendra du temps et de l'argent dont vous disposez ainsi que de votre liberté de manœuvre si la terre ne vous appartient pas. De vieux chemins forestiers, des champs en friche ou des éclaircies utilisées pour piler le bois lors des dernières coupes sont tout indiqués pour ceux qui ont un budget limité. Pour ceux qui disposent d'un peu de machinerie et de ressources monétaires, la restauration d'un bûcher est souvent recommandée et donne de très bons résultats. Finalement, pour budget sans limites, il peut être avantageux de faire la coupe dans un secteur stratégiquement bien situé à l'endroit où le sol aura en plus les composantes pour produire une nourriture de qualité. À ce stade, il est important de comprendre que le champ peut prendre la forme que vous désirez. En ce sens, il sera favorable de lui donner une forme irrégulière pour en augmenter les bordures qui généralement procurent une grande quantité d'autre nourriture d'appoint pour le chevreuil.


Élaboration d'un champ de semence 

Passons immédiatement à la méthodologie, nous reviendrons plus tard à l'aspect monétaire de l'exercice. La première opération, peu importe le choix du site, consiste à mettre le sol complètement à nu. Pour ce faire, vous pouvez utiliser différents outils. L'été dernier, nous avons fait deux champs directement sur notre terre dans deux types d'habitats différents avec le souci de maintenir les coûts le plus bas possible.

 

J'ai choisi de restaurer une partie (environ un quart d'acre) d'une petite coupe à blanc et finalement une ancienne zone de débardement (emplacement utilisé par les entrepreneurs forestiers pour accumuler le bois d'une coupe forestière avant son transport) d'environ 1,5 acre. Dans le premier cas, nous avons coupé complètement la repousse d'arbustes et de framboisiers à l'aide d'une débroussailleuse. Ensuite, nous avons nettoyé ce secteur de tous les débris de l'ancienne coupe

comme les grosses branches sèches, les roches ainsi que les souches et racines des arbres coupés trois années plus tôt. Considérant que plusieurs grosses souches n'ont pu être extraites avec un véhicule tout-terrain (4 roues), nous avons cultivé autour de ces dernières pour éviter l'utilisation de grosses machineries. Une fois le sol bien dégagé, nous avons employé une petite herse à dents d'un mètre de largeur pour compléter la préparation du sol. Celle-ci était simplement fixée puis remorquée à l'arrière du VTT. L'ajout d'un poids sur la herse peut aider considérablement à dénuder le sol convenablement. Je dois vous aviser que cette étape nécessite beaucoup de travail physique, car il faut nettoyer régulièrement la herse qui se remplit de racines de toutes les grandeurs. De plus, si le sol de l'endroit choisi renferme beaucoup de roches, ce travail a tendance à exposer ces dernières que vous devriez idéalement enlever pour augmenter la productivité de votre champ. Tous les débris furent brûlés sur place et les cendres étendues sur le futur champ pour réduire l'acidité du sol.

 

Dans le cas de la zone de débardement , nous avons dû utiliser un vieux tracteur de ferme muni d'une pelle dompeuse pour étendre la terre organique, entassée sur les côtés une dizaine d'années auparavant. Cette étape était primordiale car la pauvreté du sol sablonneux aurait nécessité l'ajout d'une trop grande quantité de fertilisant et ainsi augmenté les coûts monétaires de l'opération en plus d'engendrer des conséquences néfastes sur l'environnement.

 

 

Une fois cette étape terminée, vous devez faire un test de sol pour connaître son pH. Toutes les coopératives agricoles du Québec vous expliqueront comment prélever les échantillons de terre et feront ces tests pour vous (environ 25 $). Sans avancer des explications très scientifiques sur l'importance d'un pH équilibré, je vous résume les grandes lignes de cette étape capitale. Pour la culture en général, un sol peut avoir un pH variant entre 4,5 jusqu'à 7,5. Plus son pH est bas, plus le sol est acide. Les semences adéquates pour le chevreuil poussent bien dans des sols au pH variant entre 6,2 et 7,0 selon le type de graines. Notons simplement que la plupart des trèfles (blanc, alsike, ladino ou spécialisés comme ceux de la compagnie WHITETAIL IMPERIAL Clover et ceux de la compagnie BIOLOGIC) poussent bien à des pH variant entre 6,2 et 6,5. Pour augmenter le pH d'un sol acide, vous devez y incorporer de la chaux à raison d'environ 1,5 à 2 tonnes par acre pour faire passer un pH de 5,9 à 6,2. Cependant, il est bon de savoir que cette même quantité de chaux sera insuffisante pour espérer obtenir une hausse égale (0,3) du niveau de pH, lorsqu'un sol est plus acide et que son niveau de pH est plus bas. À titre de comparaison, pour une même acre au pH de 5,6,  vous aurez besoin d'approximativement 2 à 2,25 tonnes pour accroître le pH à 5,9. Il est donc sage de demander conseil auprès de personnes compétentes pour bien évaluer les besoins en chaux de votre sol, en fonction de la superficie traitée. Il est très important d'avoir un bon pH car non seulement ce dernier favorise un meilleur rendement de vos semences mais en plus il augmentera de manière très significative l'assimilation de fertilisant par les plantes. En effet, lorsqu'un pH est sous la barre du 6,0, l'effet des fertilisants peut diminuer de plus de la moitié. La chaux en granule est vendue en sacs de 10 à 40 kilos ou encore en vrac. Pour vous procurer une quantité importante, il est avantageux d'opter pour le vrac, vous réaliserez d'importantes économies. En achetant de la chaux en sacs, vous payerez jusqu'à 250 $ pour une tonne, tandis qu'en vrac, une telle quantité peut vous en coûter aussi peu qu'une trentaine de dollars !

 

Par conséquent, plus votre sol sera pauvre, plus l'investissement sera considérable…  Cependant rassurez-vous, une fois le taux de pH idéal atteint, celui-ci se maintiendra à un niveau acceptable pour les trois à cinq années suivantes. En effet, les sols s'acidifient relativement lentement. Pour éviter un investissement majeur après ces trois à cinq ans, vous pouvez, si vous le désirez, entretenir votre sol avec un apport minimal de chaux à chaque année.

 

Avant d'incorporer la chaux à votre sol, il peut être bon d'étendre un herbicide de type Round-Up pour vous assurer de tuer la repousse de mauvaises herbes et ainsi avoir une excellente production pour plusieurs années consécutives. Cette étape nécessite deux semaines de repos des champs après l'application de l'herbicide avant d'entreprendre l'étape finale de la semence. Dans mon cas, j'ai choisi de ne pas utiliser d'herbicide, le côté environnementaliste en moi a pris le dessus sur le

reste… J'ai aussi économisé près de 200 $ en évitant cette étape.

 

Vient ensuite l'étape de la fertilisation. Cette étape peut, elle aussi, faire partie d'une prise de conscience environnementale. En effet, les fertilisants minéraux et chimiques sont très dommageables pour l'environnement. Quoique l'utilisation de fertilisants peut facilement faire doubler la productivité d'un champ, j'ai choisi de ne pas en utiliser dans mes champs considérant que la chasse aux chevreuils est une activité de loisir avant tout. Par contre, je me dois de vous dire que certains sols nécessitent l'utilisation de fertilisants pour procurer une production convenable qui justifiera l'investissement en temps et en argent pour la préparation de votre champ cultivé. Les compagnies distributrices de semences pour les chevreuils ne vont pas réinventer l'agriculture. La production de fourrage de qualité est une science en soi très bien connue qui a fait l'objet de nombreuses études. Les conclusions sont toujours les mêmes. Au départ, plus votre sol est naturellement riche en éléments organiques et minéraux, moins vous devrez y consacrer de temps et d'argent pour y stimuler la production. D'où l'importance capitale de choisir l'emplacement de votre champ autant en fonction de la qualité du sol que de la facilité mécanique de

préparer le terrain. Tout comme le pH, ce sera le test de sol qui déterminera le type d'engrais et la quantité à y étendre pour maximiser la production. Pour ceux qui choisissent cette avenue, calculez un montant légèrement supérieur en fertilisant que ce que vous aurez investi en chaux.

 

Passons à l'étape de la semence de votre champ. Peu importe le type de graines choisi, cette étape sera presque toujours la même. Premièrement, vous avez besoin de faire un lit pour vos graines. Un lit veut simplement dire que vous devez taper votre sol pour que les graines puissent germer et s'enraciner le plus solidement possible.

 

Vous n'êtes pas obligé d'utiliser un rouleau compresseur pour cette étape. Pour les tests dont il est question dans cet article, nous avons simplement utilisé notre VTT. En conduisant à basse vitesse partout sur le sol dénudé, nos résultats furent suffisamment probants pour vous suggérer la même chose. Il est maintenant temps de semer votre futur champ. Certaines graines sont beaucoup plus petites que d'autres. En général, vous pouvez utiliser un semoir à main obtenu dans une pépinière ou une coop. Vous pouvez aussi vous procurez un semoir mécanique remorquable par VTT. Certaines personnes sèment à la main à la volée, je ne vous le suggère pas car vous devez avoir une bonne expérience pour réussir uniformément votre étendage. À cette étape, soyez le plus systématique que possible pour éviter d'avoir des secteurs sans graines et des secteurs avec trop de graines. Deux erreurs que nous avons faites sur notre terre… Les compagnies ont fait beaucoup de tests et le poids de graines suggéré pour une superficie donnée est généralement calculé pour procurer le meilleur résultat possible. Une trop grande concentration de graines risque d'étouffer la pousse et ralentir le rendement.

 

Dernière étape avant d'observer le fruit de vos efforts. Vous devez repasser avec votre VTT pour enterrer vos graines. Encore une fois, vous pouvez acheter des outils spéciaux qui s'attachent à votre VTT pour réaliser cette étape. Par contre, vous pouvez aussi être imaginatif pour réduire les frais en équipement. Faites comme nous et laissez traîner une longueur de quatre pieds de clôture quadrillée comme celles entourant la plupart des écoles. Ce fut suffisant pour remettre environ _ de pouce de terre sur les semences.

 

Comme vous voyez, le procédé est assez simple en soi. Les résultats seront en fonction de l'énergie et de l'argent que vous serez disposé à investir. Pour chaque étape de la méthodologie que vous négligerez, votre futur garde-manger pour chevreuils s'en ressentira directement. En semant vos champs à la fin mai, vous devriez être en mesure de faire une coupe au début du mois d'août pour préserver une hauteur d'environ six pouces. Ainsi, vous garderez les pousses jeunes donc plus protéiques et attrayantes pour le chevreuil. Dans beaucoup de cas, vous n'aurez pas cette option de coupe dû au sur-broutage qu'exerceront les chevreuils. Une coupe peut quand même s'avérer positive pour diminuer la repousse de mauvaises herbes si vous avez choisi l'option plus écologique sans herbicide. Cette coupe aura comme effet de tuer une bonne partie de

cette mauvaise herbe.

 

Frais encourus

Maintenant, combien coûte l'établissement d'un bon champ d'une acre de superficie en milieu forestier ? De manière générale, les mêmes frais de base reviennent toujours peu importe l'endroit sélectionné. Ces frais reliés au sol trop acide sont normaux. Il est très rare de trouver un endroit qui ne nécessitera pas l'application d'au moins deux tonnes de chaux par acre. Calculez donc environ 150 $ pour cette étape. Les fertilisants coûtent environ le même prix selon les besoins et finalement les graines coûteront entre 30 et 200 $ à l'acre selon la sorte que vous choisirez. Donc en moyenne, nous parlons d'environ 500 $ de produit par acre cultivée.

 

 

Le prix peut vite doubler voire quintupler si vous devez partir de zéro. En effet, si vous choisissez le secteur pour produire un champ en fonction de la qualité du sol et de la disposition stratégique de ce dernier pour la chasse et que malheureusement cet endroit se trouve en pleine forêt, les coûts grimpent rapidement. La coupe de bois peut se faire généralement sans frais en échange de la valeur en bois du secteur récolté. Dans les régions où les forêts de grande valeur se font plus rares, il peut être possible d'inclure dans l'échange, le désouchage et le nettoyage du secteur en question à moindres frais. Pour avoir travaillé de concert avec quelques propriétaires qui ont payé pour le désouchage et le nettoyage de quelques champs d'une acre, les coûts reliés à cette opération s'élèvent à environ 1200 $/acre. En voici la répartition: 8 heures de pelle technique en désouchage à 90 $/heure et 8 heures de nettoyage avec une gratte munie d'une lame à dents qui sert de peigne à 50 $/heure. Pour ces deux étapes, je vous recommande d'être présent pour vous assurer que ces opérations seront faites avec soin afin de conserver la couche de terre arable sur place. Certains sols n'ont pas une couche arable très épaisse et le sable remonte vite en surface lorsque l'opérateur de la machinerie va trop vite ou n'est pas attentif.

 

À cette facture, vous devrez aussi ajouter la location de l'équipement pour herser le champ si vous ne possédez pas de VTT. Comme vous pouvez le constater, la préparation d'une superficie cultivable peut facilement atteindre 2000 $/acre sans compter l'achat des semences proprement dites.

 

Peut-on réussir un champ attrayant à moindre coût ? Sur notre terre, nous avons établi un champ d'environ une acre pour la modique somme de 200 $ (incluant les semences, et la préparation du sol). Évidemment, nous étions propriétaires de la machinerie et nous avons choisi une semence (trèfle ladino) qui pousse tout de même bien à un pH bas de 6,0 à 6,2. Je n'ai donc pas eu besoin d'utiliser de chaux et j'ai choisi de ne pas engraisser le champ avec des fertilisants. Six à huit chevreuils s'y alimentaient par jour.

 

Types de semences

Après tant de points techniques sur la préparation, il ne nous reste plus qu'à regarder le type de semences à préconiser. Sur ce sujet, je dois vous aviser de plusieurs petites choses. D'abord, il n'existe aucune culture qui ne nécessite pas de travail. Quelques compagnies ont eu l'audace de mettre sur le marché des mélanges de plantes soi-disant faciles à établir, qui ne requiert aucune préparation du sol…  En théorie, ils sont conçus pour être semés directement à travers la végétation en place, puis entrer graduellement en compétition avec celle-ci pour finalement s'établir progressivement. Nous en avons testé quelques-uns et le résultat fut nul. Ne pensez-vous pas que si ces fameuses plantes existaient, les cultivateurs seraient les premiers à les utiliser pour ainsi réduire leur tâche et se débarrasser d'une partie de leur machinerie pour la préparation du sol ? Deuxièmement, d'autres compagnies ont fait la mise en marché de graines pour fourrage d'été et d'autres pour fourrage d'automne. Excellente idée en soi puisque les deux types de fourrage fournissent aux cerfs une nourriture appropriée pour convenir à leurs besoins alimentaires spécifiques du moment. Cependant au Québec, notre saison de production est trop courte pour établir des champs spécialisés à haute teneur en protéines au cours de l'été (pour favoriser la croissance des cornes) puis poursuivre par la mise en place de champs automnaux composés de plantes moins protéiques mais plus grasses pour favoriser le gain de masse corporelle chez le chevreuil. 

 

 

Ceci étant dit, nous avons testé sept sortes de graines dans plusieurs champs et plusieurs régions du Québec. La plupart d'entre elles furent mises en compétition avec d'autres types de graines. Lorsque des graines furent testées par rapport à d'autres semences, la même méthodologie fut utilisée. Les facteurs suivants ont été comparés:

 

  •  la rapidité et le taux de germination des différentes semences ;
  • la résistance à la sécheresse ;
  • la production à l'ombre ;
  • la résistance au surbroutage induit par le chevreuil ;
  • l'attrait pour le chevreuil en été et en automne ;
  • la résistance aux gelées ;
  • et finalement, à titre d'information, le taux de pH idéal pour sa culture.

Nous avons comparé deux types de mélange de la compagnie BIOLOGIC soit le produit FullDraw  composé d'une plante nommée brassica et qui ressemble à une sorte de laitue, puis le produit nommé New Zealand Fall Premium Attactant (NZFPA), qui est un mélange de chicoré, de trèfle et de plantes de la famille des navets. Un fait à noter pour les mélanges

BIOLOGIC, toutes les graines sont issues de la Nouvelle-Zélande et elles font fureur aux États-Unis. Nous avions également le produit Clover de la compagnie WHITETAIL IMPERIAL, qui est un trèfle blanc ladino à haut taux de germination. Un trèfle blanc ordinaire ainsi que de la luzerne obtenus auprès des Coopératives agrées du Québec faisaient également partie des semences testées. Le mélange Plantes Mixtes de la compagnie québécoise LA FERME MONETTE, constitué de plus de dix sortes de plantes faisait également partie du groupe et finalement le mélange Trophy Garden de l'autre compagnie québécoise BUCK EXPERT, dont le mélange contient pas moins de 14 espèces de plantes, complétait le tableau.

 

Dans quelques champs d'environ une acre, des carreaux de superficie similaire furent semés avec chaque type de graines. La même préparation fut mise en place pour chaque type de semence. Pour une idée globale des résultats obtenus, nous vous offrons une présentation par tableau pour vous rendre la consultation plus facile.

 

 

À ce stade, il serait trop simple de s'en tenir au tableau des résultats sans émettre quelques commentaires suite à de nombreuses heures d'observations directes et indirectes réalisées par des caméras de surveillance. Il faut également savoir qu'un type de graines ne réagit pas de la même façon d'un sol à un autre. Si la terre d'un secteur donné lui fournit la composition parfaite des éléments dont elle a besoin, cette graine démontrera très probablement une excellente croissance (à moins de sécheresse, de gelée ou autre facteur externe). En contrepartie, ce même type de graine peut procurer un rendement beaucoup moins intéressant en un autre endroit, uniquement en raison d'un sol inadéquat.

 

C'est d'ailleurs ce qui s'est produit lors de nos tests. Le rendement de certains types de semences a différé légèrement d'une placette échantillon à une autre. Notez que les résultats présentés dans le présent article ont été constatés sur trois différents sites de tests. En effet, nous avions deux placettes échantillons en Outaouais puis une autre en Beauce. En Outaouais, les deux sites de tests ont révélé des rendements très similaires: le mélange Full Draw de BIOLOGIC est arrivé bon premier, suivi du Clover de WHITETAIL (trèfle ladino à haut taux de germinaison), puis du trèfle blanc ordinaire. Les essais réalisés en Beauce, quant à eux, classent la luzerne en tête de ligne, suivi, ex æquo du Clover et du trèfle blanc. Le mélange Full Draw, qui s'est pourtant démarqué en Outaouais, termine la course en troisième position. Quant aux produits québécois, je suis forcé d'admettre des résultats plutôt mitigés, et ce, à tous les sites d'expérimentation. Ceux-ci sont peut-être explicables par la toute récente incursion de ces compagnies dans un secteur d'activité dans lequel elles ont très peu d'expérience.

 

 

 

À la lumière de résultats aussi variables, quel type de semence devriez-vous employer dans votre propre secteur, me demanderez-vous ? Je crois, que pour la première année, il serait préférable de semer deux à trois types de mélanges pour deux bonnes raisons. Tout d'abord, cela vous permettra de constater le rendement de chacun par rapport au type de sol de votre champ. En second lieu, vous couvrirez ainsi vos arrières, dans le cas où une semence en particulier connaîtrait une mauvaise saison.

 

 

Voyons ensemble plus en détail, les types de semences qui ont donné un rendement intéressant. Dans un premier temps, la luzerne s'est avérée définitivement très attrayante pour le chevreuil. De plus, elle présente l'avantage majeur d'être une plante vivace possédant une durée de vie variant de 10 à 15 ans. Pour lui assurer un bon rendement à long terme, il suffit de fertiliser le sol au besoin puis de vérifier et corriger, si nécessaire, le niveau de pH. Ce dernier point est toutefois l'inconvénient majeur en ce qui concerne ce produit. En effet, la luzerne nécessite un pH élevé (6,5 à 7) pour s'établir convenablement et ne produira pas de résultats concluants dans un sol trop acide. Elle est donc appropriée pour un sol dont le pH sera initialement élevé pour éviter de devoir procéder à un apport massif de chaux, ce qui entraînerait des coûts élevés. Généralement, un champ fraîchement défriché en milieu forestier sera plus ou moins indiqué pour y cultiver ce type de semence. Dans un champ déjà existant, les chances que le pH soit plus élevé sont meilleures. En tout premier lieu, avant d'arrêter votre choix sur ce type de semence, il est impératif de vérifier cette donnée. Si le niveau de pH de votre sol est faible, il serait plus sage de se tourner vers d'autres types de semences qui y pousseront bien. Ou encore, déterminez un autre emplacement au sol plus approprié pour élaborer votre champ de luzerne.

 

 

Le mélange FullDraw de BIOLOGIC a également eu une cote de popularité très élevée auprès des chevreuils. Certaines nuits de surveillance, ce carré de champ était le seul à être visité par ces derniers. Sa résistance au broutage aurait pu être favorablement comparable aux autres puisque, malgré cette utilisation abusive, les plantes ont toujours continué à pousser.

 

Dans le cadre de cet article, j'ai eu la chance de visiter les installations de Charles Alseimers (photographe et chroniqueur américain spécialisé sur le chevreuil) ainsi que les terres aménagées par la compagnie NorthCountry WHITETAIL dans l'état de New York où l'on se spécialise dans l'aménagement spécialisé de terres privées pour la production de chevreuils de qualité. Dans les deux cas, les résultats ressemblaient aux nôtres quant à l'attrait exercé par le mélange FullDraw.

 

Dans un autre ordre d'idée, il est normal de constater de bonnes résistances à la sécheresse des produits BIOLOGIC car les plantes proviennent de la Nouvelle-Zélande, un pays au climat sec. De plus, les compagnies américaines WHITETAIL IMPERIAL et BIOLOGIC ont plus de dix ans d'expérience dans le domaine des semences pour le chevreuil. Ces deux compagnies ont d'ailleurs des centres de recherche expérimentale où sont testés sur le terrain des mélanges sans cesse améliorés pour subvenir aux besoins alimentaires du chevreuil.

 

Par contre, au chapitre des inconvénients, la semence FullDraw nécessite d'être ressemée à chaque année puisqu'elle est une annuelle. En ce sens, elle engendre un investissement plus important. Cependant, la plupart des autres mélanges à l'essai doivent aussi être ressemés partiellement pour optimiser la productivité les saisons suivantes. Après trois ans, tous ces mélanges, à l'exception de la luzerne, devront être semés de nouveau pour produire à leur plein potentiel. À la lumière des résultats, je cultiverais personnellement la moitié d'un champ avec le produit BIOLOGIC FullDraw et l'autre moitié, avec le WHITETAIL IMPERIAL Clover. Si je n'avais aucune compétition avec les terres voisines, je choisirais le bon vieux mélange de trèfle blanc ordinaire des COOPS, en raison de son coût moins élevé.  Et si le sol de mon champ démontrait initialement un taux élevé de pH, j'envisagerais également l'emploi de la luzerne, qui s'avère aussi plus abordable que les mélanges spécialisés de différentes compagnies.

 

Quoique les graines des deux compagnies québécoises ont un certain attrait, elles nécessitent des améliorations notables pour rivaliser avec la compétition américaine. Pour avoir discuté à plusieurs occasions avec des agronomes et des botanistes, les compagnies québécoises font fausse route en tentant de mettre trop de types de plantes dans le même mélange et par conséquent dans le même champ. Plusieurs sortes ne germent pas dû à la compétition entre elles pour s'établir ou à un sol inadéquat.

 

 

Maintenant, qu'en est-il des questions suivantes? : Ces champs peuvent-ils concurrencer ceux des agriculteurs en milieu agro-forestier ? Y a-t-il d'autres aménagements à faire aux alentours de ces petits champs forestiers pour augmenter encore plus les chances de succès? Sont-ils la solution miracle pour les chasseurs! La disposition de certains champs peut-elle s'avérer plus stratégique que d'autres? La création de petits champs assure-t-elle des visites de jour par les cerfs environnants ? Peut-on aiguiller le déplacement des chevreuils fréquentant ces champs pour ainsi les forcer à emprunter les mêmes sentiers. Autant de questions et bien d'autres auxquelles je tenterai de répondre dans mon prochain article.

 

En conclusion, en raison du temps et des coûts relativement élevés impliqués dans la création de bons champs alimentaires, il est impératif de faire un choix éclairé quant à leur emplacement, choix qui sera dicté principalement par la qualité du sol. Si ce dernier ne constitue pas votre principal critère de décision, vous vous exposez à un rendement décevant ou alors vous serez contraints de pallier à la pauvreté du sol en injectant des sommes supplémentaires en divers produits, sans compter le travail additionnel… De plus, la préparation du sol, malgré le travail considérable que représente cette étape, ne devrait en aucun cas être bâclée ou faite à la hâte. Et finalement, il serait beaucoup plus prudent et réfléchi, du moins pour la première année, de semer deux à trois types de semences (chacune dans une section distincte de votre champ), pour éviter les mauvaises surprises et les déceptions ! De cette façon, vous serez à même de constater celles qui offrent un bon rendement en fonction de la composition spécifique du sol de votre champ. N'oubliez pas qu'un taux de pH adéquat est également un facteur déterminant pour assurer une croissance optimale. Ne perdez pas de vue que les résultats finaux seront directement reliés à la rigueur de l'exercice. Par contre, le travail impliqué et l'argent investi n'ont d'égale que la satisfaction de voir votre territoire de chasse accroître son potentiel, pour vous mener vers le succès.

 

 

Pour cet article, je dois remercier plusieurs collaborateurs qui ont généreusement donné de leur temps et ont bien voulu partager leurs connaissances. Mario Boivin, mon fidèle second sur notre terre, Bernard Fiset, Eric Tremblay, Charles Alseimers et Doug Douherty.

 

Louis Gagnon

14 mars 2004



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