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Peut-on chasser les dortoirs à chevreuils ?

J'entendais le claquement de chaque goutte de pluie qui tombait sur la tôle. J'étais caché dans une vielle cabane à sucre abandonnée et pratiquement effondrée, depuis une heure trente minutes, quand un bruit de feulement me ramena à l'ordre. Je vis immédiatement le mâle mature qui se faufilait à travers l'épais fourré dense du couvert de repos dans lequel j'étais. Au premier son que j'entendis, il était déjà à moins de 20 mètres de ma position. Je reteins ma respiration et chaque mouvement que je fis fut fait avec une lenteur extrême. Je savais d'avance que la seule façon d'obtenir un tir était qu'il passe devant mon ouverture de seize pouces par seize pouces. Il décida de contourner le site pour vérifier les odeurs. Finalement, au bout de 20 interminables minutes, il fit la dernière erreur de sa vie. Au moment où il s'apprêtait à déguster une pomme bien juteuse, ma flèche de 30 pouces lui traversa les deux poumons. Une distance de seulement treize mètres nous séparait.

Mais oui, je chassais directement à l'intérieur d'une zone de repos. Pire que cela, j'ajouterais que c'était une zone de repos pour mâles. Peut-on chasser directement les zones de repos ? Certes oui ! Plusieurs experts en matière de chasse aux chevreuils déconseillent de chasser directement ces zones. De mon côté je prône une tout autre approche. Par contre, il est impératif d'avoir bien analysé la situation et attendre les bons moments pour le faire. J'offre des formations portant sur la chasse aux chevreuils depuis plus de 8 ans. Chaque journée de formation débute de la même façon. J'explique en gros que la chasse aux chevreuils n'est qu'une affaire mathématique; tout n'est que question de probabilité et statistique. Plus on met les probabilités de notre côté, plus on aura de chance de succès. Mais si on veut augmenter nos probabilités, il faut augmenter nos chances. Exactement comme un joueur de blackjack. Donc il faut analyser nos approches, le secteur, nos façons d'y accéder et surtout le type température qui facilitera notre chasse. De grâce, ne jamais se priver à 100% de chasser un secteur de repos de mâles. Après tout, c'est bien là qu'ils passent, le jour, près de 75% de leurs temps.


L'exemple mentionné en début d'article fut réalisé en 2007. J'ai réussi cette chasse à l'aide d'un appât sur un mâle pourtant aguerri de 195 livres éviscéré. J'aime beaucoup faire des comparaisons entre l'homme et le cerf. Je me sers souvent de l'exemple suivant pour aider à comprendre mon raisonnement portant sur la chasse avec appât directement dans une zone de repos. Un homme de 40 ans ayant fumé la cigarette depuis plus de 20 ans cesse du jour au lendemain. Si son épouse dépose un paquet de cigarette sur la table de cuisine pendant que l'homme est dans la maison. L'homme pensera aux cigarettes sur la table tout au long de la journée. Peut-être même qu'il finira par succomber. Par contre, s'il faut que l'homme se déplace de 3 kilomètres pour se rendre au dépanneur le plus prêt, il y a de forte chance qu'il ne succombe pas. C'est exactement comme ça que j'ai réussi à déjouer le buck en question. Si votre appât est à deux milles pieds de lui pendant les heures de chasse. Il n'ira qu'une fois la nuit venue. Mais si votre appât est tout prêt de lui pendant le jour…

Tel que présenté dans le passage ci-haut, un appât directement dans un secteur de repos peut être une stratégie gagnante. Toutefois, il faut à tout prix respecter certaines conditions. Je recommande de chasser de cette façon surtout pour les derniers jours de votre chasse ou dans le cas où vous avez plusieurs endroits différents de chasse. Car si vous perturbez le secteur trop fortement et qu'il est votre seul secteur de repos qui vous est accessible, vous risquez d'éduquer les mâles du coin.


La première condition essentielle à respecter est d'éviter d'y chasser par journée de température stable. J'entends par température stable, des journées sans vent, pression barométrique stable et temps sec. Le risque de contamination par votre odeur corporel étant trop élevé. Il est extrêmement important de résister à la tentation d'y chasser et ce, même si vos caméras vous révèlent la présence de sujets intéressants durant le jour. Ne prenez jamais à la légère ces avertissements car ce n'est pas parce que le buck de vos rêves s'y est présenté durant les heures de chasse qu'il le fera à mouveau lorsque vous serez présent. Une seule séance d'affut en un mauvais moment peut ruiner toutes vos heures d'étude et de préparation pour ce secteur.

Les meilleurs moments pour chasser directement dans le secteur de repos sont les suivants. Noter qu'ils ne sont pas énumérés par ordre d'importance car tout est question d'analyse encore une fois en relation avec chaque habitat.

Les journées de forte pluie
Il est bien connu que lors d'une journée de pluie intense, les cerfs, en général, diminueront leurs déplacements. Par contre, ils seront plus portés à manger à l'intérieur même de leurs couverts de repos. De là, tient tout son sens de chasser un secteur de repos en une journée de pluie intense ou relativement forte. L'autre avantage de la pluie, c'est qu'elle rend le chasseur plus difficile à sentir dû à l'extrême humidité ambiante et les vents de pluie souvent forts. Ajouter à cela qu'il ne vous entendra pas arriver et vous avez une combinaison gagnante pour récolter à tout heure du jour un cerf adulte.

Les journées de vent stable
Chaque journée où le vent est omniprésent et stable est une bénédiction pour tout chasseur de chevreuils. Peu importe la stratégie adoptée, ces journées sont les plus productives de tous. Un vent provenant d'un axe fixe tout au long de la journée vous donne immédiatement l'information nécessaire afin de déterminer où chasser le dit secteur de repos. La condition première étant bien entendu, la prospection qui vous aura donné les informations à savoir où sont les mâles à l'intérieur de ce même secteur. Un exemple: le vent souffle vers une direction où vous suspectez la présence de bucks (savoir évaluer vos probabilités et statistiques), et ce, en considérant votre poste d'affut dans l'équation comme point de départ du vent, vous venez alors d'identifier un poste d'affut à ne pas utiliser en fonction d'un vent qui proviendrait de cette direction. Autrement dit, si vous décidez de chasser le secteur de repos le matin, vous devez éviter de chasser un vent qui souffle dans la direction d'où arriveront vos mâles. Commencez-vous à comprendre toute l'importance d'une bonne prospection et analyse du terrain ? Il m'arrive parfois de jouer le tout pour le tout et de chasser en fonction de leur arrivée matinale en sachant très bien qu'une fois qu'ils auront passé mon poste d'affut, ils pourront me sentir, mais qui risque rien n'a rien…

L'importance d'être matinal
La plus part du temps les mâles ne sont pas pressés d'entrer dans leurs dortoirs le matin. Ils prendront souvent au moins 1 heure de clarté avant d'y arriver pour y passer la journée. N'étant pas pressés, ils ont tout le loisir de bien analyser le terrain. Pour la chasse du matin, il est important d'y arriver bien avant eux afin de laisser le temps à l'environnement de retrouver sa quiétude. Mais surtout, il ne faut pas croiser leurs sentiers d'accès. Durant justement cette heure où les mâles ne sont pas pressés d'y arriver, ils brulent du temps à faire des frottages au tour de ce secteur de repos. Il est donc facile de trouver par où ils arrivent en cherchant les sentiers qui sont marqués par les frottages. Ces mêmes frottages vous indiquent s'ils y arrivent de matin ou de soir en interprétant le tout en fonction des sites nourriciers. Dans le cas d'un sentier qui sert d'accès le matin, j'y arriverai par la direction contraire bien avant le lever du jour. Ne sous-estimez pas le nez des chevreuils du Québec. Le simple fait de laisser une odeur de pas suffit à faire dévier de son chemin la plupart des mâles de 2 ans et demi ou plus. Je suis d'avis aussi que pour chasser efficacement les secteurs de repos, il faut être prêt à y demeurer à l'affut tout au long de la journée. Dans un secteur de repos, il n y a pas d'heure où les probabilités sont à zéro, un buck peut déboucher devant vous à toute heure du jour.

Si vous décidez d'y chasser que pour la passe de l'après-midi, il faudra être convaincu de ne pas déranger les cerfs présent. Voilà pourquoi les journées de mauvais temps sont si favorables à chasser les dortoirs. L'autre aspect qui ne nous donne pas de marge d'erreur en après-midi près des sites de repos est que la pression atmosphérique descend beaucoup à l'approche de la nuit. Cela a pour effet de transmettre au le sol notre odeur corporelle. Pour contrer cela, je recommande de chasser au sol en fin de journée. Votre dispersion d'odeur sera moins grande étant au sol qu'en hauteur. Aucune cache et affut n'est nécessaire pour surprendre un mâle dans sa cachette, un simple arbre renversé ou tout autre écran naturel suffit. L'important est justement de le surprendre dans son repère.

En fin de compte, comme toute autre stratégie ou approche de chasse, la chasse dans les secteurs de repos demande de l'analyse de la part du chasseur. On peut récolter un mâle n'importe où, à condition d'avoir fait nos devoirs. À ce sujet voici quelques conseils de prospections et aménagements qui vous aideront à chasser les dortoirs sans bouleverser le site.

La prospection devrait se faire soit immédiatement après la saison de chasse que vous ciblez. Cela constitue l'idéal de toutes les possibilités. Par contre, il est possible de prospecter en été. Je choisis les journées de pluie ou quand la météo annonce de forte pluie dans les heures suivantes. Il est important que vos odeurs soient délavées le plus tôt possible suite à votre prospection. L'installation d'affut portable devrait se faire aussi dans les mêmes conditions. Si vous connaissez déjà les sites d'embuscades prévus je vous recommande l'installation de ceux-ci au printemps, aussitôt que vous avez accès à votre terrain. Les chances que vos mâles locaux ne soient pas encore revenus sur leur routine régionale étant forte, vous aurez moins de chance de les éduquer. S'il y a des branches ou arbres à couper pour emménager des lignes de tir, vous devrez être extrêmement prudent. L'hiver est une saison morte pour bien des chasseurs, je vous recommande d'aller effectuer ces lignes de tir en hiver. Rien de tel qu'une sortie en raquette pour garder la forme physique. Mais pourquoi en hiver? La grosse majorité des cerfs du Québec ne sont plus dans leurs secteurs automnals une fois l'hiver installé. Ils sont partis en ravage, alors ils ne pourront pas être perturbés.


Un sentier d'accès ou de sortie
Pour emménager un sentier d'accès à votre affut, je recommande la même approche que pour les lignes de tir. J'ajoute par contre les conseils suivants: ne jamais faire vos sentiers en lignes droites, mais plutôt en formes irrégulières. Il sera important de choisir une journée de météo exécrable à plus ou moins, un mois de l'ouverture afin d'aller vérifier "l'embourbement" du sentier. Le vent a souvent la fâcheuse habitude de faire tomber arbres morts et branches dans nos sentiers. Dernier conseil, je vous recommande fortement une pratique d'accès. Certains resterons surpris de mon raisonnement, mais bon, suivez-moi et vous comprendrez. Je ne me souviens plus à combien de reprises durtnt ma carrière de chasseur, je me suis préparé en fonction de telle ou telle stratégies, par contre, une fois le jour « J » arrivé, progressant à la noirceur, j'ai dû vider des églises complètes à la recherche du fameux sentier. Il est très facile de reconnaitre un sentier durant le jour, mais en pleine nuit et même parfois avec une lumière sur la tête, il est beaucoup plus facile d'y perdre notre sang froid. S'enfoncer dans un fourré dense peut être bruyant pour tout l'environnement. En plus, si je dévie de mon sentier, je risque fort de ne pas respecter ma stratégie d'approche et croiser des sentiers de cerfs que je voulais à tout prix éviter. Les golfeurs s'exercent, les archers s'exercent, même les pêcheurs professionnels s'exercent ! Alors pourquoi ne pas vous exercer? Débuter vos pratiques par des nuits de pleine lune, vous verrez qu'avec un minimum de pratique votre cerveau enregistrera votre parcours de noirceur plus vite que vous ne l'auriez cru. N'ayez crainte de les déranger, vous avez cibler cet endroit comme un de repos de jour, donc ils seront dans leur secteur nourricier. J'ai souvent installé des miradors portables en pleine nuit, profitant du fait que mes chevreuils étaient aux champs, j'avais tout le loisir d'installer mon mirador pour les y attendre le lendemain matin en surprise.

L'appât dans tout ça
Plusieurs stratégies de chasse peuvent être mise en place dans un secteur de repos. L'utilisation de leurres olfactifs, les méthodes d'appels ou la bonne vieille méthode du fantôme. Par contre si comme dans l'exemple en début d'article, les pommes font partie de votre stratégie, inutile de vous dire qu'une approche particulière doit être observée pour le ravitaillement. Certains vont sursauter en lisant les prochaines lignes. Par contre, tous seront d'accord avec moi sur cet énoncé: le dortoir est l'endroit où ils passent le plus de temps de jour, voir même toute la journée. Donc il est pratiquement impensable d'y pénétrer régulièrement sans le perturber quelques fois. J'y vais donc de nuit. La logique est simple. Les mâles sont partis vers leurs sites nourriciers de nuit. Donc ils me laissent entrer chez eux sans problème. L'utilisation d'appareils photos de surveillance m'a confirmé cette théorie durant les dernières saisons. Un secteur de repos alimenté avec un appât recevra 5 fois plus de visites de jour que de nuit. Ne voyez-vous pas la lumière au bout du tunnel ? J'ai même un site de repos qui reçoit de la visite de mâles strictement de jour. Mon fils ainsi que celui de mon partenaire y ont prélevé chacun leur buck respectif en deux soirs de chasse consécutifs à l'automne 2012 (bonus vidéo). L'approche d'un ravitaillement par semaine devrait être considéré comme suffisant. Assurez-vous d'y laisser une quantité d'appât suffisante pour durer justement une semaine.

Le tout pour le tout
Dans chaque région, voir rang de campagne, il y a toujours des sanctuaires naturels qui servent de secteur de repos ou cachettes lors de haute pression de chasse. Une fois les premiers jours de la saison passés, les cerfs expérimentés ont tôt fait de changer leurs habitudes. Parfois ils changeront même de secteur de repos si la pression environnante y est trop omniprésente. Ce que je cherche est un endroit où les chasseurs ne peuvent ou ne veulent pas aller. Les zones humides marécageuses où les herbages sont fortes et camouflent tout le paysage, les buchers de quelques années non débroussaillés ou les plantations relativement jeunes. Parfois même des terrains commerciaux tout près des centres urbains peuvent recueillir un nombre impressionnant de cerfs quand la chasse à l'arme à feu bat son plein non loin du grand centre. Certains de ces fameux terrains n'ont que très peu d'arbres, mais ont une végétation arbustive des plus denses. Si vous avez ce type de couvert dans votre secteur je vous invite à aller y jeter un coup d'œil. Vous serez probablement surpris par la quantité de frottages que vous y trouverez. Dans ces sanctuaires de circonstance, vous pourriez réaliser votre plus beau tableau de chasse à vie !

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